Ce matin-là de Gaëlle Josse

Par Lettres&caractères

Je n’avais encore jamais lu Gaëlle Josse avant Ce matin-là. Les fidèles de cette auteure semblent dire qu’il y a mieux à lire d’elle. Je les crois bien volontiers…

Ce matin-là de Gaëlle Josse (éditions Noir sur blanc)

Je les crois bien volontiers et je les crois d’autant mieux que j’ai été totalement sous le charme de cette écriture marquée par la douceur et la pudeur et à la fois très sceptique quant à la manière qu’elle a d’aborder un thème aussi douloureux que le burn-out. Cette cassure nette, ce moment où plus rien de ce qui faisait votre vie n’a de sens : se lever, s’habiller, aller au travail, reproduire les gestes du quotidien, mille fois répétés. Ce moment où tout devient insurmontable, infranchissable, où l’énergie vous a déserté, laissant un champ de ruine où plus rien ne semble pouvoir prendre racine, ni projets, ni désirs.

Je n’ai pas été personnellement victime de ce ras de marée mais j’ai eu l’occasion de l’observer autour de moi et rien de ce que j’ai vu n’a ressemblé à la balade nostalgique que Clara semble entamer ce matin-là. Le profond désespoir, la violence du choc pour l’entourage, le temps qu’il faut pour s’en relever, les séquelles à long terme, je n’ai rien retrouvé de ce cataclysme chez Clara.

L’imprimante expulse plusieurs pages, il les commente en les lui tendant une par une. L’arrêt de travail, deux semaines pour commencer, dans votre cas ce n’est pas du luxe, ils se passeront de vous au bureau, c’est ça l’urgence, on se revoit ensuite. Des comprimés pour tenir, pour dormir, pour se calmer, se détendre, en attendant. Elle ne sait pas en attendant quoi, mais elle n’ose pas demander. Elle ferme les yeux.
Elle se voit ingurgiter du sécable, du dispersable, du soluble, du buvable, du croquable, de l’avalable, quantité de molécules qui vont murmurer à son cerveau que tout va bien.

Pour être honnête, j’avais des attentes très précises vis-à-vis de ce livre. J’espérais lire un roman sur le burn-out qui soit aussi juste et fidèle que Les heures souterraines quand Delphine de Vigan aborde avec brio la spirale infernale du harcèlement moral au travail. J’attendais d’être remuée, bousculée, chavirée voire perturbée mais pas anesthésiée comme semble l’être aussi Clara.

Avec Ce matin-là, Gaëlle Josse nous livre un beau roman, pudique et élégant, mais presque hors sujet. Toujours est-il que la déception sur le fond n’entame en rien mon envie de découvrir cette auteure et je m’en remets aux fins connaisseurs pour me conseiller d’autres titres qui sauront cette fois, concilier le fond et à la forme.


L’ESSENTIEL

Couverture de Ce matin-là de Gaëlle Josse

Ce matin-là
Gaëlle JOSSE
Editions Noir sur blanc
Sorti le 07/01/2021
214 pages


Genre : roman contemporain
Personnages : Clara et Cécile, son amie
Plaisir de lecture :
Recommandation : oui
Lectures complémentaires : Les heures souterraines de Delphine de Vigan, Juste un peu de temps de Caroline Boudet

RÉSUMÉ DE L’ÉDITEUR

Qui ne s’est senti, de sa vie, vaciller ? Qui ne s’est jamais senti « au bord de » ? Qui n’a jamais été tenté d’abandonner la course ?
Clara, trente-deux ans, travaille dans une société de crédit.
Compétente, investie, efficace, elle enchaîne les rendez-vous et atteint ses objectifs.
Un matin, tout lâche. Elle ne retourne pas travailler. Des semaines, des mois de solitude et de vide s’ouvrent devant elle.
Amis, amours, famille, collègues, tout se délite dans l’ordre ou le désordre de leur apparition dans sa vie. La vague de fond qui la saisit modifie ses impressions et ses sentiments.
Ce matin-là dévoile la mosaïque d’une vie et la perte de son unité, de son allant et de son élan. Une vie qui se refuse à continuer privée de sens et doit se réinventer. Une histoire minuscule et universelle porteuse d’espoir.


TOUJOURS PAS CONVAINCU ?

3 raisons de lire Ce matin-là

  1. Pour la très belle plume de Gaëlle Josse
  2. Pour l’universalité du thème (personne n’est à l’abri de vivre un matin comme celui-là)
  3. Pour le message d’espoir qu’il contient malgré tout

3 raisons de ne pas lire Ce matin-là

  1. Parce tout est trop atténué
  2. Parce qu’il y a une vraie cassure dans le roman avec une seconde partie peu plausible et une fin décevante
  3. Parce que je suis persuadée qu’il y a mieux à lire de cette auteure

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