Que sur toi se lamente le Tigre – Emilienne Malfatto

Par Mesechappeeslivresques

Titre : Que sur toi se lamente le Tigre

Auteure : Emilienne Malfatto

Date de parution : septembre 2020

Editions : Elyzad

C’est l’histoire d’une jeune femme parmi tant d’autres dans l’Irak d’aujourd’hui. Une vie qui grandit dans son ventre et qu’elle va payer de la sienne, de son sang.

Car en Irak, les relations hors mariages sont interdites et l’homme qu’elle aimait est mort sous les bombes.

C’est son frère aîné qui, au décès de leur père, a hérité de l’autorité paternelle. C’est lui qui tuera sa propre sœur. Parce que son funeste destin est inéluctable. L’honneur prime sur la vie.

«Je suis le frère, celui par qui la mort arrive. Je suis l’homme de la famille, l’aîné, le dépositaire de l’autorité masculine – la seule qui vaille, qui ait jamais valu. Je suis le frère qui a pris le rôle du père. Je règne sur les femmes. Je suis l’assassin. Je vais tuer tout à l’heure et je l’ignore encore. Que ferais-je si je le savais? Ferais-je demi-tour dans l’allée poussiéreuse? Je vais tuer tout à l’heure et je penserai que je n’ai pas le choix. Sa vie ou notre honneur à tous.»

Ce court roman se lit d’une seule traite, en apnée. Telle une tragédie grecque, les membres de la famille prennent tour à tour la parole afin d’évoquer la mort à venir. Des voix multiples auxquelles se mêle celle du Tigre. Un fleuve témoin des guerres, de la folie des hommes et du drame qui se déroule sous nos yeux.

Les mots sont justes, sans fioritures, puissants.

«Je suis douce et soumise, je reste voilée dans la maison, devant mes beaux-frères, une épouse comme il faut. Je ne ris pas trop fort et ne parle pas trop. Une femme respectable. Je suis celle qui ne questionne pas, qui ne bouscule pas. Je suis celle qui accepte sa condition, qui n’imagine pas qu’une autre vie est possible.»

Un récit révoltant et dramatique qui nous dépeint un monde où les femmes sont condamnées dès la naissance, prisonnières de leurs voiles et des hommes qui régissent la société dans laquelle elles vivent. Et si ce texte est une fiction, les faits qui s’y déroulent sont toujours d’actualité en Irak.

«Dans cette famille, une femme déshonorée est une souillure que seul le sang peut laver. On jettera des pelletées de sable sur son corps et sur son souvenir, on l’oubliera au vent du désert et aux pluies de décembre, jusqu’à ce que tous, nous puissions prétendre qu’elle n’a jamais été.»

Un véritable uppercut.