Lumière d’été, puis vient la nuit, de Jon Kalman Stefansson

Par Krolfranca
Lumière d'été, puis vient la nuit

Jon Kalman Stefansson

Traduit de l'islandais par Eric Boury

Grasset

26 août 2020

320 pages

" Il faut être défunt pour ne pas penser à la mort. "

Ce roman a été écrit par Stefansson en 2005 (date de parution en Islande) avant celui qui l'a fait connaître en France, Entre ciel et terre. Nous découvrons donc l'œuvre de Stefansson dans le désordre.

Un village situé dans l'ouest de l'Islande, peu d'habitants, ils se connaissent tous, c'est une petite communauté et nous allons vivre à son rythme.

Ce roman se déroule comme une pelote de ficelle, un personnage surgit, puis un autre et encore un autre et on suit ainsi l'histoire de l'un puis celle de l'autre, parfois elles s'emmêlent et le lecteur démêle alors les écheveaux pour aller encore plus loin. C'est donc un roman qu'on peine à poser tellement il nous emmène d'un chemin vers un autre et l'on souhaite que ça ne s'arrête jamais.

" Si nous continuons à accumuler ces histoires, si nous peinons autant à nous arrêter, c'est peut-être aussi parce que celui qui a pour projet de décrire la vie a tendance à en étirer le fil - tout ce que nous entreprenons est d'une manière ou d'une autre une lutte contre la mort. "

La narration à la première personne du pluriel ne permet pas au lecteur de savoir qui parle, qui raconte, si ce n'est ce nous collectif, le village, les habitants dans leur globalité, en tout cas un narrateur omniscient. Cela donne au roman un ton particulier, enchanteur, cela permet les pointes d'humour, les digressions et surtout, le lecteur veut en apprendre toujours davantage sur les habitants, sur les phénomènes étranges qui ont lieu dans l'Entrepôt, sur les liens qui unissent les uns et les autres, sur la vie et la mort.

" [...] Pas plus que nous n'oublierons l'interrogation de Björg : pourquoi ai-je vécu ? Faut-il voir en ces récits sur nos vies et nos morts au village et dans les campagnes voisines une tentative de réponse à cette question, ainsi qu'aux doutes et incertitudes qu'elle engendre ? "

Les récits centrés sur des personnages différents à chaque chapitre, dévoilent des êtres seuls, en mal d'amour, de lien social, nous suivons les joies mais aussi les peines, les chagrins d'amour, les peurs, les hésitations, les voies du destin, tout ça avec en filigrane une légère critique de notre société matérialiste.

Certaines pages transpirent de désir sexuel, la vie dans ce qu'elle a de plus âpre, de plus profond, la vie qui remue nos tripes, qui irrigue notre bas-ventre et qui procure autant de plaisir que de destruction.

" N'allez pas imaginer que c'était facile, notre conscience a le don de gâcher nos plaisirs charnels. "

J'ai pris un plaisir infini à dérouler les fils des vies des villageois. Stefansson allume toujours en moi, une petite lumière.

Merci à Netgalley et aux éditions Grasset.