Les roses de Somerset – Leila Meacham

Par Cpmonstre

Vous avez besoin d'évasion, d'une écriture très accessible, d'une romance con-con avec des personnages butés, dotés d'un sens de la non-communication congénitale qui jump the shark à tout bout de champ mais avec ce petit quelque chose qui fleure bon les sagas de l'été ?

Bravo ! Vous êtes au bon endroit

(et vous avez des besoins bizarrement très précis)

1914. Somerset la plantation de coton, en plein cœur du Texas, est le cœur et le poumon des Toliver qui nourrissent une obsession sans borne pour la tradition terrienne : l'imminente dynastie fondatrice du bourg de Howbutker avec les Dumont et les Warwick vit en harmonie jusqu'au jour où le vieux Toliver meurt et lègue Somerset à sa cadette Mary, 16 ans. Coup de grâce et scandale pour la mère et le frère lésés de leur héritage, Mary se voit non seulement toute seule pour gérer l'exploitation familiale mais aussi devoir s'arranger avec les griefs de son faible frère et de son abominable mère (chère Darla, tu resteras dans nos mémoires à jamais #Letricotcestrésistant). Et si cela ne suffisait pas, la demoiselle est follement amoureuse de Percy Warwick, l'arrogant - alias #leMâle - mais néanmoins charmant héritier du clan Warwick qui est bien décidé à lui faire oublier Somerset pour toujours (c'est ça mon gars, boit de l'eau fraîche).

(Si vous pensez très fortement à Autant en emporte le vent, c'est normal. Ça n'a quasi rien à avoir, mais ça me semble être l'argument marketing de ce roman).

Comment Mimine s'est retrouvée à lire un mélo très mélo ? Aucune idée.

Comment elle a embarqué de force sa copine @June&Cie dans cette lecture commune ? En la piégeant avec la promesse de bons cookies, entre autres. Je suis une vraie une copine en or.

Et nous avons été sub-jugués (de rire, de RIRE) mais aussi... d'un certain plaisir coupable. Car oui c'est exactement ce que j'avais en tête quand j'ai commencé la lecture : quelque chose de rapide à lire avec son lot de rebondissements virevoltants et tournoyants, des larmes et de la déception, des déclarations enflammées sous un soleil foudroyant...

Bref

du bon gros

On a pu compter sur une écriture leste et simple qui se débarrasse allégrement des détails jusqu'au fin fond de la grange. Autrement dit bonjour les archétypes, bonjour les clichés, bonjour la simplicité :

→ les personnages n'ont aucune réelle personnalité à part une seule caractéristique qui permettra à l'intrigue de les faire bouger au fil de ses besoins (le lâche, le gentil, la méchante mégère, la femme trompée, le colérique...), à l'instar de ce pauvre Ollie Dumont qui une fois son rôle de gentil ami terminé a disparu purement et simplement de la circulation. Au revoir sympathique unijambiste sans couilles (littéralement), on aurait aimé te connaître.

→ les héros et héroïnes sont très beaux mais en même temps " pas comme tout le monde ", vous savez, ils ont ce petit truc en plus, cet éclat de noisette-capuccino dans le regard, cette petite fossette bien placée... Ils sont UNIQUES.

N'attendez donc pas de longues descriptions au coin du feu ni de grande profondeur psychologique, Madame Leila Meacham est là pour vous raconter une histoire et elle va droit au but.

Straight to the point, okay ?

Oui voilà.

Enfin non.

Nous parlons d'une autrice texane des années 80, et certainement très pratiquante, qui planque ses scènes de cul sous le tapis poussiéreux à l'image d'un joli fondu noir pudique d'un film des années 50. Mais il y en a (comment faire avancer l'intrigue sans concevoir des bébés illégitimes sinon, hein COMMENT ?!), elles sont juste sous-entendues par des regards brûlants et des doigts frétillants sur les boutons de la chemise.

Vous me voyez un peu taquine, mais je dois reconnaître qu'il y a un aspect que j'ai vraiment apprécié :

L'héroïne ne pleure (quasi) jamais.

Je ressors généralement catastrophée par la caractérisation des héroïnes dans les romances et le personnage de Mary là-dessus m'a plutôt agréablement surprise. Si elle n'a pas été écrit avec une immense finesse (faut pas déconner non plus), elle présente des caractéristiques assez peu " féminines " (entendez bien par là ce qu'on attribue habituellement aux femmes dans la fiction) :

Têtue, elle se montre même parfois égoïste, et surtout, surtout les enfants, tenez-vous bien : elle est loin d'être prête à abandonner ses ambitions pour les beaux yeux d'un étalon imbu de lui-même (on t'aime Mary), quitte à être idiotement butée à certains moments cruciaux (on t'aime moins Mary), quitte à changer d'avis tout d'un coup (on t'aime carrément plus Mary).

Malheureusement,

ce roman relève souvent de la grosse paresse de gros matou : ça ronronne tellement qu'on devine très vite les (peu) rebondissements et enjeux de l'intrigue. J'ai été assez déçue du manque réelle d'ambition narrative car quitte à aller dans le soap et le bon gros mélo qui tache, allons-y nomdedieu, à fond ! Même l'histoire d'amour compliquée se trouve décevante :

1/ elle est drôlement convenue (manque d'ambition toussa)

2/ mais surtout elle n'est même pas belle : on n'a tout simplement pas très envie de voir le beau Percy (qui est drôlement antipathique) et la fougueuse Mary finir ensemble tellement leur incompatibilité intellectuelle est criante.

Enfin, la troisième et dernière partie du roman nous a manifestement achevées d'ennui et de consternation, révélant à la lumière du jour les plus grands défauts du roman. Particulièrement mal agencé dans sa dernière ligne droite, on réexplique des points de l'intrigue à de nouveaux personnages encore plus fadouilles et inconsistants et laisse sur le carreau un lecteur très ennuyé qu'on lui re-raconte en 100 pages ce qu'il a lu déjà en 450.

Cette aventure restera en tout cas gravée dans nos mémoires (et dans nos archives textuelles et vocales WhatsApp). Avec cet aspect de roman-feuilleton, Les roses de Somerset est dans ta vie de confiné(e) ce que les sagas sont à l'été : une échappade rigolote (et parfois) indispensable pour la santé du cigare.