Un lieu à soi

Par Entre Les Pages @EntreLesPages

Un lieu à soi est un recueil de conférences données à l'université de Cambridge en 1928. Des conférences qu'on lui avait " commandées ". L'ouvrage est divisé en 6 parties dont certaines furent retravaillées par l'auteur pour la publication. Dans ses textes, Virginia Woolf s'interroge sur les femmes et l'écriture de la fiction au regard de leur conditions de vie. Elle considère que si les femmes veulent écrire, il leur faut un endroit à elles et de l'argent. Ce sont des choses qu'elle-même possède, qui lui apportent ce sentiment de liberté et lui permettent de créer. Elle s'interroge donc sur comment procèdent ou ont pu procéder certaines de ses consœurs. Elle rappelle au passage comment certaines, comme Jane Austen par exemple, écrivaient dans des salons bruyants, cachaient leurs écris, écrivaient parfois sur des minuscules bouts de papier. Féministe, Woolf réfléchit, étudie, est consciente de sa chance et prend donc la parole pour celles qui n'ont pas sa chance.

La réflexion de Virginia Woolf est un voyage à travers ses yeux, ses connaissances, ses doutes. Il ne faut pas oublier qu'elle utilise la technique d'écriture du " stream of consciousness ". Les descriptions sont précises, poétiques, longues. Elles interrogent, claquent, surprennent. Entre analyses à remettre dans leur contexte et analyses incroyablement d'actualité. Le lecteur ne sait pas toujours où il est se trouve. Il doit se laisser emporter, se laisser nourrir, apprécier les mots, l'ironie, l'humour, les références. Il est dans une boutique, puis dans un jardin ; il se promène et son esprit aussi, aux côtés de celui de Woolf, à la fois si fort et si fragile, auquel il s'attache.

En 2016, Marie Darrieussecq offre une nouvelle traduction àA room of one's own
Dans le titre, " room " devient enfin " lieu " plutôt que " chambre ".

Citations choisies :
" La fiction ressemble à une toile d'araignée, qui pour être attachée de façon très fine est tout de même attachée à la vie par quatre coins. Souvent cette attache est à peine perceptible [...] Mais quand la toile est tirée de travers, accrochée d'un côté, déchirée au milieu, on se souvient que ces toiles ne sont pas tissées au milieu de l'air par des créatures désincarnées, mais qu'elles sont le travail d'êtres humains qui souffrent, et qui sont attachés à des choses grossièrement matérielles, comme la santé et l'argent et les maisons où nous vivons. "

" Le roman ouvre en nous toutes sortes d'émotions antagonistes et opposées. La vie entre en conflit avec quelque chose qui n'est pas la vie. D'où la difficulté de se mettre d'accord sur les romans, et l'immense emprise qu'ont sur nous nos préjugés intimes. "

Un lieu à soi rassemble une série de conférences sur le thème de la fiction et des femmes que Présentation de l'éditeur :
Virginia Woolf prononça en 1928 à l'université de Cambridge. Ce vaste sujet a donné naissance à une tout autre question, celle du lieu et de l'argent, qui donne son titre à l'essai : "Une femme doit avoir de l'argent et un lieu à elle si elle veut écrire de la fiction." À la manière d'un roman, et s'appuyant sur l'histoire littéraire, Virginia Woolf retrace ainsi le cheminement qui l'a conduite vers cette célèbre thèse, qui reste incontournable de nos jours. Chef-d'œuvre de la littérature féministe, Un lieu à soi brille d'un nouvel éclat sous la plume de Marie Darrieussecq. Jouant de l'humour et de l'ironie de Virginia Woolf, cette traduction propose une remise en perspective essentielle de la question de l'écriture et des femmes au sein de la littérature contemporaine.