La soustraction des possibles de Joseph Incardona

Par Lettres&caractères

Avec sa couverture dorée, le dernier Incardona annonce la couleur. On va parler fric les amis ! Pas de celui qui manque pour finir le mois mais de celui qui passe les frontières au fond d’une mallette pour aller se refaire une virginité dans un paradis fiscal.

La soustraction des possibles de Joseph Incardona (éditions Finitude)

Dans le milieu des ultra-riches, Aldo, prof de tennis mais pas que, sait se servir de ses atouts pour grappiller quelques miettes auprès d’épouses esseulées. Mais jouer les gigolos et se faire entretenir, c’est gagne petit. Alors quand sa maîtresse lui trouve un boulot à même de satisfaire son appétit vorace, Aldo saute sur l’occasion. Il lui suffira de transporter quelques valises de la France vers la Suisse pour empocher au passage une coquette commission, rien de plus facile en cette période bénie de la fin des années 80 où posséder un compte en Suisse fait partie des signes extérieurs de réussite. Rapidement pourtant, ce petit boulot ne lui suffira plus. En croisant le chemin de Svetlana, une jeune banquière à l’ambition chevillée au corps, Aldo se trouvera pris dans un tourbillon d’amour, sexe, magouilles et compagnie, en quête d’argent, beaucoup d’argent, toujours plus d’argent…

Ce livre n’est pas arrivé au bon moment dans ma vie. Je n’avais pas envie de ça en ce moment. Pas envie d’un roman avec une fois encore un style trop marqué et qui écrase tout. Joseph Incardona est présent, trop présent même, dans ce roman. A coup de petites interpellations, d’ironie, de clins d’œil appuyés, de digressions il cherche à créer une connivence avec le lecteur mais je n’ai jamais été adepte de ce procédé lorsqu’il est utilisé à outrance. Je trouve que ça enlise le récit, ça casse la dynamique narrative en formant une sorte de mélasse à laquelle tout s’agglutine. Ça manque de nerf.

Parfois le jeu est ainsi fait : des hommes laids ou malveillants abusent de leur pouvoir en s’octroyant des femmes qui ne les regarderaient pas dans une réalité différente ; en échange, des femmes profitent de leur beauté et accèdent à des situations professionnelles qu’elles n’obtiendraient pas autrement.

Ajouté à cela la technicité du sujet – la finance internationale et le blanchiment d’argent plus particulièrement – et vous vous retrouvez avec un roman exigeant pour lequel je n’avais pas la disponibilité d’esprit nécessaire. Comme j’ai beaucoup peiné à avancer dans cette lecture, j’en ai perdu tout plaisir. CQFD.

Pourtant je lui reconnais une grande qualité littéraire, c’est un roman ambitieux qui mérite une lecture attentive. Le style est riche, l’écriture recherchée, les personnages fouillés. C’est très visuel aussi avec des scènes que l’on imagine tournées en Super 8. C’est bourré de qualités, ça plaira à un grand nombre de lecteurs qui se délecteront de ce style unique. Mais ça n’est pas ce que je suis en capacité d’apprécier en ce moment. Pour situer mes envies de lectures, je suis davantage à la recherche en ce moment de romans comme le Bûcher des vanités que comme La soustraction des possibles. C’est la dure loi des lectures imposées en un temps donné…

La soustraction des possibles est le roman sélectionné par le jury d’avril pour le Grand prix des lectrices Elle 2020


L’ESSENTIEL

Couverture de La soustraction des possibles de Joseph Incardona

La soustraction des possibles
Joseph INCARDONA
Editions Finitude
Sorti le 02/01/2020
400 pages 

Genre : roman contemporain
Personnages :  Odile et René, Aldo et Svetlana
Plaisir de lecture :
Recommandation : oui mais aux amateurs de Jaenada et consorts
Lectures complémentaires : Goldman sucks de Pascal Grégoire, Chères toxines de Jean-Paul Jody, L’affaire Mayerling de Bernard Quiriny

RÉSUMÉ DE L’ÉDITEUR

Fin des années 80, c’est la période bénie des winners. Le capitalisme et ses champions, les Golden Boys de la finance, ont gagné : le bloc de l’Est explose, les flux d’argent sont mondialisés. Tout devient marchandise, les corps, les femmes, les privilèges, le bonheur même. Un monde nouveau s’invente, on parle d’algorithmes et d’OGM.

À Genève, Svetlana, une jeune financière prometteuse, rencontre Aldo, un prof de tennis vaguement gigolo. Ils s’aiment mais veulent plus. Plus d’argent, plus de pouvoir, plus de reconnaissance. Leur chance, ce pourrait être ces fortunes en transit. Ils pensent qu’il suffit d’être assez malin pour se servir. Mais en amour comme en argent, il y a toujours plus avide et plus féroce que soi.

De la Suisse au Mexique, en passant par la Corse, Joseph Incardona brosse une fresque ambitieuse, à la mécanique aussi brillante qu’implacable.


TOUJOURS PAS CONVAINCU ?

3 raisons de lire La soustraction des possibles

  1. Si vous aimez les styles d’écriture très personnels et incarnés
  2. Si le thème de la finance et du blanchiment d’argent vous fait envie
  3. Si vous aimez les romans avec une multitude de personnages et de thèmes qui s’entrecroisent

3 raisons de ne pas lire La soustraction des possibles

  1. Si comme moi vous n’êtes pas adeptes des narrateurs omniscients qui jouent la connivence à outrance à coups de digressions
  2. Si vous cherchez un roman fluide et qui nécessite peu de concentration
  3. Si les romans au thème complexe, technique et pointu vous rebutent

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