Premières lignes #107 : La moitié d’un Roi

Par Pommy @Pomme___Rouge

Premières lignes est un rendez-vous initié par Ma lecturothèque. Le principe est simple, tous les dimanches, je vais vous citez les premières lignes d’un ouvrage.


1
Le plus grand bien

La tempête faisait rage la nuit où Yarvi apprit qu’il était roi. Ou du moins, la moitié d’un roi.
Il soufflait un vent fureteur, comme le nommaient les Gettlandais : il s’élevait depuis père Océan en gémissant tel un damné, s’insinuait dans chaque fissure de chaque demeure pour glacer ses habitants, blottis les uns contre les autres au coin du feu.
Il faisait claquer les volets aux étroites fenêtres des quartiers de mère Gundring, trembler la porte en bois et acier dans son cadre. Il taquinait les flammes dans l’âtre, qui crachotaient de colère en retour, projetant sur les murs les sinistres ombres frémissantes des bouquets d’herbes séchées pendus au plafond ainsi que des racines que tenait mère Gungring dans ses doigts noueux.
– Et ceci ?
« Ceci » avait l’allure d’une simple motte de terre, mais Yarvi n’était pas dupe.
– De la racine de Langue-noire.
– Pourquoi un ministre en chercherait-il, mon prince ?
– Un ministre espère ne pas avoir à en chercher. Une fois plongée dans l’eau bouillante, elle n’a plus ni odeur, ni couleur, ni goût. Cependant, elle constitue un poison des plus mortels.