TOP 10 Albums jeunesse 2019

Par Lupiot

C'est la saison des tops, t'as failli oublier ?

Et comme chaque année, je suis au rendez-vous ! Et pour la première fois depuis longtemps, je suis même à l'heure au rendez-vous, vu qu'on est encore en janvier, hé, franchement ?!

Ne t'inquiète pas, j'ai encore de la marge pour te décevoir, puisque ce n'est que le 1er top d'une longue série et que je peux donc être en retard sur tous les suivants : yay !!

Voilà le programme :

- Top 10 Albums jeunesse 2019
- Top 10 Littérature jeunesse 2019
- Top 15 Littérature ado 2019
- Top 20 bande dessinée 2019 (jeunesse et adulte)

Le tout en janvier !

Ah, j'adore le goût des promesses bientôt brisées au petit-déjeuner. Sur ce, c'est parti !

L'ours transparent est l'histoire d'un ours tristoune et solitaire (un peu misanthrope sur les bords, peut-être ?) qui voit sa vie terne chamboulée avec l'arrivée de sa voisine Odette, quant à elle joyeuse et colorée ; le pitch assez classique est servi par une tendresse acidulée qui fonctionne à merveille, et la délicatesse des illustrations est irrésistible.

(J'adore les histoires d'amitiés complémentaires.)

Attention, album format gigantesque !

Ici aussi, pitch classique mais terriblement puissant si bien exécuté : l'opposition entre un univers contrôlé où rien ne dépasse, gris et dystopique, et un personnage qui, par définition, n'est pas à sa place : ce géant aux couleurs chatoyantes dont personne ne veut.

Le géant chagrin est une double réussite artistique et littéraire : très beau texte, juste et épuré, de Carole Martinez, et supeeerbes illustrations à la Klimt de David Sala ; dix sur dix.

Nous sommes là est le pari d'un jeune père (Oliver Jeffers) qui, dans l'attente de son enfant, essaie de lui faire un topo de tout ce qu'il y a à savoir avant d'arriver. Déjà pardon mais je craque, ensuite je suis une fan devant l'éternel de cet artiste, qui mêle des technique de peinture oufissime avec des dessins super candides, et crée ainsi un univers terriblement personnel et parfaitement, parfaitement adapté au merveilleux aussi bancal qu'exigeant de l'imaginaire enfantin.

Ici on part du système solaire (le fameux " Nous sommes là " pointé sur la Terre) puis, du plus général au plus particulier, avec unn simplicité, et une forme de drôlerie, on arrive jusqu'aux proches, la famille humaine qui va accueillir le bébé.

" Tu comprendras beaucoup par toi-même. Souviens-toi seulement de laisser des notes pour les autres. "

PS : c'est beau.

Hector et les bêtes sauvages était un coup de cœur dès la couverture de l'album, du coup bravo l'illustratrice et l'édito : j'étais vendue avant de l'ouvrir.

Mais en plus, quand je l'ai lu, j'ai été éblouie par la justesse de ce portrait de gamine, devenue " trop grande " n'est-ce pas, depuis qu'il y a un autre bébé dans le coin... Alors bravo l'autrice ; je ne pensais pas que ça pouvait être encore plus touchant et charmant que ça n'était beau.

Bon j'avoue tout : ce que j'adore, moi, dans les albums, c'est le portrait qu'ils dressent de l'enfance. En cela je vois très bien que je ne suis pas le public idéal (= une adulte), mais en même temps, je me rappelle aussi assez clairement avoir adoré, gamine, qu'on parle de l'enfance comme un concept. D'abord parce que j'adorais qu'on parle de moi (hellooo, narcissisme de l'enfance) ensuite parce que, par suite, il s'agissait presque toujours d' explorer le concept d'IMAGINATION, très étroitement lié au précédent.

Dans Nino dans tous ses états, on parle d' imagination comme je la préfère au monde, c'est-à-dire en tant qu'elle fait de nous, chaque minute de chaque jour et selon les circonstances, des gens différents.

Nino est un petit boy qui est à la fois un frère, un petit-fils, un super copain..., et chacune de ses identités est profondément nourrie de son imagination - et inversement.

(Image de droite empruntée à Les mots de la fin)

Une super histoire de cow-boy est
1) ultra-drôle, humour de qualité optimale ;
2) le meilleur exemple jusqu'ici pour démontrer les dynamiques singulières et géniales de l'album, qui unissent texte & image d'une part, histoire & méta-propos d'autre part ;
3) illustré avec une expressivité proprement délicieuse ❤

En page de gauche, une histoire de cow-boy raconté par une voix 1 (autrice) et en page de droite, une réponse illustrée commentée par une voix 2 (dessinatrice) qui n'approuve pas du tout les choix de la voix 1 et s'inquiète énormément pour les lecteurs. GOLD.

Le train fantôme a tout ce que j'adore : des monstres creepy, un imaginaire à la Poe, une aventure à bord d'un train, un bout de suspense, un peu de magie, une histoire de famille dramatique, des problèmes de communication entre frère et sœur, une énooooorme portée symbolique et une fin heureuse qui t'arrache néanmoins un gros soupir douloureux.

Bref, il est parfait !! Un album d'une beauté à couper le souffle par ailleurs (le détail, haha), qui te donne l'impression d'avoir revêtu un morceau de nuit. La qualité de ces noirs bleutés est dingue.

Timothée de Fombelle n'est pas le dernier des salsifis, en matière de littérature jeunesse. Il a notamment un don pour m êler la grande et la petite Histoire avec une forme d'intimité d'une humanité incroyable, pour fiancer les grands et les petits problèmes, entremêler les barreaux des deux échelles et les bloquer dans un casse-tête beau et charmant, que tu poses à l'intérieur de ta poitrine comme une décoration zen*. C'est ce qu'il fait merveilleusement dans Le Livre de Perle (l'un de mes tout premiers articles sur ce blog on ne juge pas) ou dans Capitaine Rosalie, et c'est ce qu'il fait ici.

*Si je t'ai perdue avec mes métaphores discutables, pardon.

Quelqu'un m'attend derrière la neige est un conte de noël, mais pas le genre rouge-et-or, chaussons et bedons remplis, joie et cotillons. Plutôt le genre ambiance feutrée - temps froid - grands drames - petits gestes tendres - souvenirs - main invisible sur ton épaule - absurdité du monde - solitude - amour - beauté indicible.

C'est une très belle histoire, tu dois la lire.

J'ai déjà fait un article sur un album de Rébecca Dautremer (), ce qui en dit long sur mon émerveillement car c'est la seule critique d'album que j'ai rédigée ici, ever.

Et depuis, elle ne cesse de se renouveler en tant qu'artiste et en tant qu'autrice, avec Les Riches Heures de Jacominus Gainsborough (en 2018), un conte tendre et presque philosophique qui retrace la vie remplie (folle, douce et parfois triste), d'un petit lapin discret et solitaire, puis avec Midi-pile (en 2019), un objet d'art en découpe laser qui à l'inverse nous plonge au cœur d'une petite heure de vie de ce même lapin avec moult détails, façon épuisette à attraper l'émerveillement.

Clique sur l'image pour ouvrir YouTube.

Si j'ai choisi Jacominus c'est d'abord parce que c'est mon préféré ( duh) de tous ses albums so far, et ensuite parce que je le trouve d'une rare délicatesse émotionnelle ; ce n'est pas qu'il me serre le cœur exactement mais il me... parle ? Comme un ami perdu qui reviendrait me souffler à l'oreille.

Cet album parvient à s'adresser à l'adulte comme à l'enfant sur des sujets aussi complexes, fins, graves, que la mort, l'incertitude, l'amour, la timidité, l'ennui, avec une justesse et une poésie remarquables. Et il parvient également à happer tous ces lecteurs, à les entraîner dans la profondeur et la richesse de ses incroyables double-pages. Je veux dire, regarde ça ! Que tu aies 5 ans ou 100, tu passes facilement vingt minutes à observer les détails de chaque image et y inventer des histoires...

(Tu peux cliquer sur chaque image pour les agrandir.)

Enfin, dernier de cette liste et mon vainqueur de cette édition Top Album 2019...

de Heike Faller et Valerio Vivaldi
(Seuil 2019)

100 ans, tout ce que tu apprendras dans la vie, est un projet pompeux à souhait, quand on considère que le concept de l'album est de consacrer une page à chaque âge de la vie et d'en extraire l'essence en une phrase. La prétention du truc !
Sauf que...

Ça. Marche.

Ça marche si bien que je retenais mon souffle pendant les deux tiers de la lecture, frappée par la justesse de chaque page. Plus tu avances dans le livre, plus tu as les larmes aux yeux. (Enfin, moi, en tout cas.)

C'est d'une intelligence et d'une empathie incroyables. Un travail en duo comme rarement j'en ai vu d'aussi parfait, car l'illustration et le texte se fiancent avec tant d'ahrmonie qu'on les croirait sortis du même cœur. Bref j'arrête car je me noie dans le plus complet glucose et ça va finir par être gênant.

Petit extrait de cet énorme album :



Bon ; il m'est impossible de vous restituer en quelque extrait que ce soit la puissance émotionnelle de cet album. Ni sa beauté colorée, simple et épurée. Sa générosité. Vous allez l'ouvrir sans trop rien espérer, puis vos doigts vous se mettre à trembler, parce qu'une petite bombe aura explosé dans votre poitrine à la page 27, 60, 85. Ça fera mal plusieurs fois. Shrapnels everywhere. Vous en redemanderez.

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C'était mon Top lecture albums jeunesse de l'année !
C'est la première fois que j'en fais un. Parce que les albums, j'ai tendance à considérer que j'y connais rein. Mais cette année, j'en ai lu plein, so ! Je m'y essaie. C'est ma petite contribution à tes découvertes. Émerveille-toi ici et ruine-toi en librairie !
(Tu peux aussi emprunter en bibliothèque si tu n'est pas un enfant du capitalisme comme moi.)

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Évidemment c'était difficile de faire un Top 10 ; aussi, pour les plus gourmands, je recommande également ces coups de cœur-ci :

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En résumé, mon Top 10 albums de l'année :

Partage tes coups de cœur avec moi s'il te plaît,
c'est quelque chose que j'aime et j'en ai jamais vraiment assez.

Julia