Repose-toi sur moi

Par Sebulon

Repose-toi sur moi – Serge Joncour

Flammarion (2016)

Ludovic travaille pour une agence de recouvrement. Son quotidien, c’est rendre visite à des gens endettés et arriver à leur faire signer des chèques pour un remboursement échelonné de leur créance. Depuis qu’il a quitté la ferme familiale après le décès de sa femme, il exerce sa mission avec conscience mais sans passion.
Aurore est une styliste réputée, cofondatrice de l’entreprise qui porte son nom et sa marque, et qui est confrontée à des difficultés financières. C’est aussi la mère de deux jeunes enfants et l’épouse d’un businessman américain. Malgré cette vie bien remplie, Aurore est particulièrement contrariée par la présence de deux corbeaux dans la cour de son immeuble haussmannien, deux corbeaux dont les croassements l’angoissent outre mesure. Par hasard, elle fait part de ses craintes à Ludovic, qui habite un autre immeuble donnant sur la cour. Ludovic est sensible à l’inquiétude de la jeune femme qu’il a déjà aperçue par la fenêtre et il fait le nécessaire pour éliminer les corbeaux. Une étrange relation se noue alors entre ces deux êtres si différents qui vont trouver chacun dans l’autre l’occasion de dépasser les rôles qu'ils tenaient jusque là.
 

Ainsi, Ludovic, dont l’existence est plutôt terne et sans histoire, devient une sorte de héros aux yeux d’Aurore grâce à l’aide qu’il lui apporte à plusieurs reprises. Aurore, qui est fragilisée par la trahison de son associé, trouve auprès de Ludovic l’écoute et la présence dont elle a besoin. Plus tard, lorsque Ludovic traverse une période compliquée, elle sait, mobilisant ses réflexes de chef d’entreprise, trouver le ressort nécessaire pour faire face.
L’histoire met du temps à s’installer, entre les visites de Ludovic à ses clients endettés et ses séjours à la ferme de ses parents, et les démêlés d’Aurore face aux machinations de son associé. Mais il faut patienter, apprécier les différents styles de roman qui se succèdent ici : roman social, roman d’amour, thriller même. On suit tour à tour les interrogations de Ludovic et d’Aurore sur leur relation et les idées fausses qu’ils se font l’un de l’autre, leur manque de confiance en eux, leur ignorance de leur valeur. Le dénouement est surprenant, mais assez évident finalement. On ressent un certain apaisement, la fin de la lutte contre soi-même, contre les autres, juste l’envie de prendre soin de soi, de prendre le temps de vivre.
Un beau roman qu'il faut laisser se développer à son rythme. C'est la deuxième fois que je lis Serge Joncour, ce n'est pas la dernière !