La vie parfaite de Silvia Avallone

Par Krolfranca

La vie parfaite

Silvia Avallone

Traduit de l’italien par Françoise Brun

Liana Levi

2018

402 pages en poche

Le roman s’ouvre sur un accouchement et continue sur l’histoire des personnages pendant les neuf mois précédents cette naissance.

Une bien belle construction qui navigue entre deux lieux, deux femmes, deux destins. Ces vies vont se croiser et s’entrecroiser avec subtilité. L’atout majeur de ce roman est l’écriture. Grâce aux ellipses, aux non-dits, aux pensées intérieures plus suggérées qu’énoncées, l’auteure dessine avec finesse des personnages qui souffrent…

Adele a dix-sept ans, elle tombe enceinte accidentellement. Elle vit dans un quartier pauvre. Le père est aussi jeune qu’elle, pas fiable du tout, petit voyou qui finira en prison. Dora est une femme mûre, professeure d’italien, qui vit au centre ville, sa misère à elle c’est son désir inassouvi d’enfant. Elle en crève jusqu’à en être insupportable.

Silvia Avallone sait émouvoir le lecteur, elle dit le mal, elle dit la souffrance, elle met des mots sur ce qu’il y a au plus profond de l’être humain.

Encore une fois elle m’a touchée (elle l’avait déjà fait avec D’acier), davantage, peut-être, avec l’histoire d’Adele que celle de Dora, et si durant une bonne partie du roman l’auteure met l’accent sur un certain déterminisme social, elle parvient à balayer tout ça d’un revers de main en évoquant les circonstances qui ont fait de ces personnages des êtres de révolte et de sang.

« … il y a des forces contre lesquelles on ne peut rien. Peut-être plus irréparables encore qu’un désir stupide et égoïste. »

Elle parle du désir d’enfant (ou du non désir d’ailleurs) avec justesse, sans en faire trop, les mots claquent et font mouche, les situations sont réalistes et donc parfois dures, parfois exaspérantes. On prend certaines scènes en pleine figure, ça fait mal et en même temps elles sonnent tellement vraies.

Silvia Avallone serait-elle la romancière des démunis, des paumés, des égarés ? En tout cas, ses mots leur donne vie avec une certaine authenticité. Elle ne verse jamais dans le cliché, dans les bons sentiments, dans le populisme, dans la vulgarité.

J’ai particulièrement aimé le personnage de Zeno, l’être de lumière qui apporte une once d’espoir dans ce monde noir et glauque, Zeno sauvé grâce à l’écriture, grâce à la littérature. Et de littérature, il en est drôlement question dans ce roman avec des références à Dostoïevski, Flaubert ou encore Kafka.

Silvia Avallone est une auteure que je vais continuer à lire parce que sa verve et sa vitalité m’épatent.