Demba Diop. 16 avril 1917. La Force des Rochers. Tempoe, Mor et Florent DANIEL – 2013 (BD)

Par Vivrelivre @blandinelanza

Demba Diop

16 avril 1917

La Force des Rochers

Scénario de Tempoe

Dessins de Mor

Couleurs de Florent DANIEL

Editions Physalis, octobre 2013

48 pages

Thèmes : Première Guerre Mondiale, Tirailleurs Sénégalais, Racisme, Histoire, Mémoire, Documentaire

1917

Troisième année de guerre et les forces de l'Armée Française sont épuisées, saignées.

Au Sénégal, des officiers militaires français sillonnent le pays afin d'enrôler ou d'emmener de force des hommes. Pour les appâter, une prime d'engagement de 50 francs, de la nourriture et des vêtements.

C'est ainsi que Demba (dont le grigri offert par la belle Ayoun, lui donne "la force des rochers") et Sékou Diop, deux frères, partent de Diamniadio pour la France.

Le voyage est éreintant, l'uniforme pas à la bonne taille, les acclimatations météorologique et alimentaire pénibles, la barrière des langues et les mots déformés (le sabir) rendent les communications difficiles.

L'accueil est chaleureux par les autres soldats, glacial par certains officiers, qui se fichent de leur " bien-être ".

1917 et les terribles batailles du Chemin des Dames, où sont envoyées en masse les troupes issues de colonies, dont les Tirailleurs Sénégalais.

Le but de la mission de ce 16 avril : conquérir les deux tranchées allemandes et les déloger du Moulin de Laffaux.

Il a raison de Capolar.
Les canons vont nous protéger.
Mais au fond de moi, je me disais...
Est-ce qu'il y a assez de canons pour protéger tous les hommes !

Les pages de l'avant combat puis de l'assaut sont saisissantes.

Elles sont entrecoupées de quelques cases qui nous emmènent au village des deux frères, sous le soleil sénégalais, qui leur fait évoquer l'avant et renforcent la tension du moment : le combat qui fait rage et que les quelques arrêts permettent de supporter.

Cet album retranscrit très bien le climat dans lequel ces hommes, arrachés à leur terre, sont arrivés en France, dans ce conflit qui n'était pas le leur (celui des "Toubabs" contre les "Allamands"), pour un pays qui n'était pas le leur, dans des conditions exécrables, et dans un mépris (et racisme) certain, bien que non généralisé, heureusement. Mais le scénario reste assez en surface. Il constitue une bonne première approche pour connaître la "Force Noire", dont l'usage permettait selon l'Etat-Major de'épargner le "sang blanc". Il donne envie d'en savoir plus.

Les dessins sont très beaux, emplis de bruits et de fureur, couleurs de boue, de gris, avec quelques éclats de bleu (uniformes français - bleu horizon) ou de rouge ("oiseau de feu" = obus" ou sang). Mais il est parfois difficile de reconnaître qui est qui, notamment chez les Tirailleurs , qui ici, sur le Chemin des Dames, ne sont pas dans un uniforme bleu avec chéchia rouge, mais dans un uniforme marron/kaki avec casque Adrian marron.

C'est un album sur la guerre mais aussi sur une amitié, par delà la mer et les différences.

L'épilogue nous la retranscrit particulièrement bien.

Il est issu d'une histoire vraie : Demba Diop a fait partie du 1 er Corps d'Armée Coloniale, rattaché au 6 e régiment du Général Mangin.

Sa couverture, magnifique, est un tirage limité, et reproduit le portrait au pastel du tirailleur Coulma Cone (Mokata, Soudan) réalisé par le peintre suisse Eugène Burnand.