La souplesse des os et La vraie vie

Par Marie-Claude Rioux

C’est parti pour un premier billet sous forme de bilan hebdomadaire. Dans cette nouvelle formule allégée, je te ferai part de ce que j’ai lu durant la semaine et de mes abandons, que jespère rares. J’irai dorénavant droit au but: je laisserai tomber les résumés quon trouve partout sur le Net et je me concentrerai sur mes avis qui nengagent, comme toujours, que moi. 


LA  SOUPLESSE DES OS – D. W. WILSONCe recueil de nouvelles, je l’attendais avec autant d’impatience que j’attends mon premier café du matin. J’ai lu le premier roman de D. W. Wilson lors de sa parution en 2015. Ça s’appelait Balistique et c’était sacrément bon. J’étais folle comme un balai en apprenant que la traduction de son recueil de nouvelles allait enfin paraître. J’ai mis la main dessus au Festival America. Pas question de patienter jusqu’à la fin octobre, date de son arrivée au Québec.Les douze nouvelles de La souplesse des os sont situées à Invermere, une petite ville de la Colombie-Britannique. Douze nouvelles remplies d’hommes qui tentent de plier la vie pour ne pas plier sous elle, qui tentent de recoller les pots cassés. Des hommes amochés, des adolescents qui jouent avec le feu et se brûlent. Des relations pères-fils fracassées, mais solides comme un fil à pêche.Winch se demanda si les bons souvenirs survivraient ou s’ils se couvriraient tous de rouille pour se réduire à cette cuisine plongée dans la pénombre, à cette carabine désossée, à son père en larmes. Le café tiédit et devint visqueux mais lorsque Winch l’approcha de ses lièvres, il souffla quand même dessus – il ne voulait pas voir la réalité en face, parce que si le café était chaud, s’il restait chaud, il aurait raison de ne pas quitter la table, et ils pourraient jouer le rôle de fils et de père, le temps de quelques inspirations encore.Ces douze nouvelles, dans lesquelles certains personnages reviennent d’une nouvelle à l’autre, à différents moments de leur vie, sontancrées dans un quotidien plus vrai que nature. Pas de chute finale, pas de spectaculaire ni de pathos. Juste la vie, dans toute sa belle grisaille. Portées par une écriture sans complaisance, simple et belle, ces nouvelles et l’atmosphère qui s’en dégage vont continuer de m’habiter longtemps. La souplesse des os,D. W. Wilson, trad. Madeleine Nasalik, Éditions de lOlivier, 272 pages, 2018.·  ·  ·         ·  ·  ·         ·  ·  ·LA VRAIE VIE – ADELINE DIEUDONNÉ On voit cette Vraie vie partout sur les réseaux sociaux. Ad nauseam, même. Je le fais rarement, mais là, j’ai décidé de suivre la vague et de le lire. L’histoire en elle-même m’intriguait, même si j’ai l’impression qu’il y a, ces temps-ci, plusieurs romans concoctés à partir de la même recette, soit celle qui met en scène un frère et une soeur (ou deux soeurs) dans de mauvais draps.

Ce genre de roman me plait bien. Je ne m’en lasse pas. Ici, j’ai aimé aller à la rencontre de ce père obsédé par la chasse, de cette mère écrasée au tapis, amoureuse de ses chèvres, de ce petit frère angélique qui se transforme en hyène carnassière. Sans parler de cette ado prête à tout pour que le lien qui lattache à son frère retrouve la vigueur de ses débuts. Mais une fois disparues, l’innocence et la naïveté de l’enfance sont souvent perdues à jamais...Même si j’ai apprécié ces personnages pour leur singularité, j’ai été incapable de m’attacher eux. Reste que pour moi, là où le bât blesse le plus, c’est dans la voix de la gamine. C’est par ses yeux que les liens familiaux et les relations tendues se dévoilent. Le hic, c’est que par moment cette voix sonne terriblement faux. Quelques exemples parmi d’autres:Je ne sais pas si elle existait avant de le rencontrer. J’imagine que oui. Elle devait ressembler à une forme de vie primitive, unicellulaire, vaguement translucide. Une amibe. Un ectoplasme, un endoplasme, un noyau et une vacuole digestive.Chacun s’en retournait à sa prostration solitaire, devant sa télé, cultivant, au choix, dépression, aigreur, misanthropie, apathie ou diabète.Une boule d’angoisse incandescente a carbonisé ma poitrine.Certaines maisons semblaient hurler la solitude de leurs occupants et l’inconsistance vertigineuse de leur existence.Je trouve que c’est charrier fort venant de la bouche d’une pré-ado. Contrairement au Manuel de survie à l’usage des jeunes filles de Mick Kitson, dans lequel la voix de la gamine sonnait parfaitement juste, ici ça clochait trop souvent à mon goût. Et il y a la fin. Je l’ai trouvé plutôt convenue, sans grande surprise. Disons que ça pouvait difficilement finir autrement... Une prévisibilité dont je me serais bien passée. 

Le roman d’Adeline Dieudonné suscite un fort engouement. Et à cela, je ne peux qu’applaudir. Certaines images marquent durablement, comme les images d’un film d’horreur (ce pauvre vendeur de glaces...). L’ambiance glauque et inquiétante, peuplée de silence et de violence, marque aussi. Mais tant qu’à parler de romans belges marquants parus récemment,Débâclede Liz Spit reste, pour moi, une coche au-dessus de La vraie vie, et ce, à maints niveaux (solidité et originalité de l’intrigue, qualité de l’écriture).La vraie vie,Adeline Dieudonné, L’Iconoclaste, 270 pages, 2018.


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Crois-le ou non, j’ai mis la main sur un livre de recettes. Je ne me souviens pas de la dernière fois où c’est arrivé. Mais qu’est-ce que tu veux, avec ma nouvelle cuisine et l’arrivée de l’automne, l’occasion était trop belle. À moi À la soupe de Josée di Stasio (Flammarion Québec). J’ai mangé une soupe concoctée par Maud et j’en ai cuisiné une autre. Les deux étaient à se rouler par terre. Des recettes simples et accessibles, parfaites pour une néophyte du fourneau comme moi!Bon ben, au final, c’est pas si mal comme billet allégé. Tu trouves pas? Sur ce, à la revoyure! Je retourne sous ma couette.