T’es sûr que tu veux aller….. là-bas ?

Par Ciena Ollier @cienaollier

Bonjour à toutes et à tous,

J’avais promis de vous raconter mes vacances en Tunisie.

Comme j’y suis partie quinze jours et qu’il y a pas mal de choses à raconter, je préfère faire de petits articles.

Il faut dire aussi que j’appréhendais d’y aller mais, comme le dirait ma belle-fille, « de la mort qui tue « !

Je sais que pour beaucoup d’entre vous la Tunisie c’est le soleil et la mer à 1h00 de Paris mais moi, qui suis originaire de là-bas, j’ai une relation amour-haine avec ce pays pour différentes raisons personnelles. J’ai mis 25 ans à y revenir. Et encore… A cause de Xavier.

Parce que monsieur Xavier, lui, qui n’avait jamais pris l’avion ni été allé dans un pays arabe (et donc avait toutes les raisons de ne pas avoir envie de quitter le territoire) s’était mis en tête que quitte à se pacser avec une fille d’origine tunisienne, ben, autant en savoir plus sur le pays.

Du coup on a eu une conversation du genre  :

« T’es sûr que tu veux aller là-bas ? Ils bouffent de l’harissa »

« M’en fout. Je mange ça à la cuillère et je prendrai ce qu’il faut comme médocs »

« Il fait chaud »

« Autant que dans le sud »

« Les nanas portent le foulard »

« Comme notre voisine »

« Tu pourras pas m’embrasser dans la rue sans aller au poste de police »

« Cool ça me fera de quoi raconter sur Facebook »

*Tu vas avoir plein de coups de soleil »

« Je resterai à l’ombre »

« Tu vas t’ennuyer »

« Hé t’as vu, y a même des dizaines de fab labs à visiter ! »

Oui parce que dans le genre psychotique, je m’imaginais déjà dans « Jamais sans ma fille », arpentant des rues pleines de « Samia Orosemane », qui m’offriraient des gâteaux rien que dans l’espoir que je reparte avec un hijjab ou que Xavier rencontrerai LE POTE qui le convaincrait de se faire pousser la barbe et porter la jellaba.

Bref, n’arrivant pas à le convaincre de changer d’avis (et aussi tentée par l’idée de passer quinze jours dans un hôtel quatre étoiles en bord de mer pour le prix d’un week-end chez Ibis budget), je prends mes tranquillisants et direction l’aéroport.

Bien sûr l’avion a du retard et, au final, nous arrivons à l’hôtel à 22h00 au lieu de 17h00. Je commence à râler auprès d’un responsable à l’aeroport de Tunis-Carthage qui m’accueille avec le sourire « je suis que c’est une française celle-là » et me demande quelle compagnie d’avion j’ai utilisée.

« Ben Tunis Air pourquoi ? »

« Franchement j’aurais été vous j’aurais pris Air France. Ils sont bien Air France. Un peu chers mais au moins ils sont à l’heure. Pas comme chez nous ! »

….Ok….

Moi qui m’attendait à un discours patriotique….

Je venais, sans le savoir, de faire l’expérience de la franchise à la tunisienne. Comme me dira plus tard un chauffeur de taxi « Pourquoi ? il fou dire la viriti ! Ca fait mal mais pourquoi tu mens ? Ca sir à rien et si pas comme ça qui ti apprends »

Bref nous débarquons à 22h00 crevés, affamés mais…. là :

       

L’hôtel Vincci Flora Park à Yasmine à Hammamet. Un hôtel quatre étoiles dans un des complexes touristiques les plus prisés de Tunisie…. jusqu’aux attentats, la révolution du jasmin; la chute du dinar et ses conséquences économiques.

De ce fait, en plein mois de juin, malgré une température plus que chaude, il n’y avait presque personne.

D’ailleurs comme, justement, les touristes étaient rares, il nous a été impossible de trouver de quoi manger à l’hôtel et nous avons dû arpenter, à peine arrivés, les rues désertes de Yasmine à la recherche de quelque chose à grignoter.

Dégoûtés et fatigués, nous allions rentrer nous coucher quand un passant tunisien nous montre une sandwicherie.

On ne lui avait rien demandé de particulier mais il avait vu nos mines déconfites et on lui avait fait de la peine.
Ca aussi, on l’apprendra plus tard, semble faire partie des coutumes tunisiennes : ne pas laisser une personne dans l’embarras quand on peut l’aider (et, pour certains, gagner un peu d’argent au passage plus ou moins honnêtement)….

Nous nous sommes donc dirigés vers la sandwicherie mais son patron fermait. Il nous a alors proposé de voir son voisin, qui tenait un resto et louait sa salle pour une petite fête privée. Certes ce n’était pas très correct de nous incruster et les vigiles payés pour l’occasion nous avaient bloqués le passage quand un homme derrière nous leur dit en arabe « c’est bon tu peux les laisser passer c’est des français » ! Visiblement notre nationalité nous donnait le sésame pour entrer, manger un délicieux repas et boire une bière fraîche, en terrasse, à une table spécialement mise pour nous, le tout au prix d’un jambon-beurre.

J’avais toujours su qu’en Tunisie les français avait un statut particulier mais je pensais qu’en vingt cinq ans ça aurait changé. Il fallait croire que non et on m’expliqua par la suite qu’au contraire, depuis la départ des touristes français au profit des touristes russes, plus fortunés mais bien moins respectueux, ils étaient encore plus appréciés qu’avant.

Je commençais à être rassurée. Xavier, lui, attaquait sa deuxième assiette de Ojja (une sorte d’omelette piquante à la sauce dont les espagnols et les tunisiens raffolent) et apprenait gaiement à n’utiliser comme couvert que son morceau de pain.

A deux heures du matin, complètement morts, on regagnait notre chambre pour passer notre première nuit sur un autre continent.