Les porteurs d’eau

Par Un_amour_de_bd @un_mour_de_bd

Chronique “LES PORTEURS D’EAU”

Scénario de FRED DUVAL
Dessin de NICOLAS SURE

Genre : Polar

Public : ado / Adultes
Paru le 30 mai 2018 aux éditions DELCOURT
128 pages couleur,
17,95 euros

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Ça commence comme ça…

Jérôme et Florian en sont convaincus, ils tiennent le coup de siècle. Une simple récupération de produits dopants à la frontière belge va leur assurer un pactole facilement gagné. Mais voilà, les deux jeunes gens ont à peine le temps de charger leur coffre que la douane leur tombe dessus. Nos deux compères réussissent à échapper avec la marchandise mais aussi l’argent qui devait servir à l’acheter. Un course-poursuite s’engage alors entre eux, la police, les douanes et la mafia qui compte bien récupérer son argent.

Ce que j’en pense

Il arrive quelquefois d’ouvrir un album en s’attendant à quelque chose et de découvrir un univers à mille lieues de nos attentes. Ça a été le cas pour moi avec “Les porteurs d’eau”. Je pensais en effet découvrir une enquête policière musclée, mais c’est tout autre chose que l’auteur Fred Duval nous propose ici. En effet, s’il y a bien une enquête dans cet album, celle-ci est pratiquement anecdotique. Le scénariste a préféré écrire une intrigue basée sur un sujet ô combien tabou (même si les médias s’en emparent tous les ans en été), le dopage dans le monde du cyclisme. Il se sert habilement de ses personnages pour nous dépeindre un monde un peu à part où mafia et sportifs passionnés se croisent parfois. Duval ne juge pas, il énonce des faits et nous ferait même prendre conscience que ces hommes et femmes, souvent brisés, sont avant tout les victimes d’un spectacle de plus en plus inhumain. Dans un passage, il explique même avec beaucoup de détails la douleur atroce que ressent un grimpeur en pleine côte, j’avoue avoir eu mal pour eux.

Même si cet album reste une pure fiction, Fred Duval dépeint des personnages plus vrais que nature. Je me suis même pris d’affection pour ces deux “gamins” apeurés d’avoir mis le doigt dans un engrenage bien trop dangereux pour eux. Mais Florian et Jérôme ne sont pas les seuls personnages intéressants, bien au contraire. Les seconds rôles eux aussi ont tous des fêlures que l’auteur exploite sans trop en faire. De la mère de Jérôme qui avoue à son fils avoir vu son père se doper, mais qui n’osait rien dire de peur de perdre son train de vie, à son parrain surnommé “Pierrot le fou” dont les multiples cures de désintox l’ont éloigné de toute vie sociale. Mais ce n’est pas tout, l’auteur créé une véritable interaction avec tous ses protagonistes, un peu comme dans les films de Tarantino. Florian et Jérôme sont à la fois poursuivis par la police, les douanes, la mafia et les personnes qui les ont mises sur le coup et qui ont maintenant peur pour leur peau. Un véritable sac de nœud comme nous les aimons !

Pour finir, le dessinateur Nicolas Sure “a-ssure » (bon, elle était facile je sais…) en nous en mettent pleins les yeux ! Il nous plonge dans ce road trip (qui n’en est pas vraiment un au final) avec des dessins de très haute voltige. Les cases sont pleines à craquer de détails, tout en restant lisibles et les personnages sont croqués à la perfection. Un quasi sans-faute ! Et cette idée de nous présenter le tout à la façon du “tour de France”, du pur génie.

“Les porteurs d’eau” est donc un album plus que réussi, qui plaira aux inconditionnels de la “petite reine” mais pas seulement. Une immersion dans un monde où les amoureux de leur discipline côtoient malheureusement trop souvent les amoureux de l’argent sale. À lire absolument.