Esclaves aux Trois-Rivières. Hervé MADAYA – 2017 (Dès 12 ans)

Par Vivrelivre @blandinelanza

Editions Les Points sur les i, collection " Réconciliation ", mai 2017

Thèmes : Esclavage, XVIIIe siècle, Amitié, Amour, Entraide, Liberté

Je crois avoir beaucoup lu sur le thème de l'esclavage (et je sais qu'il m'en reste encore beaucoup à découvrir), mais cela concernait presqu'exclusivement les Etats-Unis. Or, il n'y a pas qu'eux qui ont " bénéficié " de cette manne quasi gratuite et corvéable à merci : Il y a aussi eu les Îles, françaises, hollandaises et anglaises.

Trois-Rivières, c'est le nom d'une ville (en rouge) de Guadeloupe, île française.

Elle doit son nom aux trois cours d'eau qui parcourent son étendue : La Rivière du Trou au Chien ; la Rivière du Petit Carbet ; la Rivière Grande Anse.

Entre elles se trouvaient auparavant de nombreuses plantations de cannes à sucre (aujourd'hui de bananes), dont les riches propriétaires tiraient profit grâce aux esclaves noirs ramenés d'Afrique.

Hervé Madaya nous emmène dans l'une d'entre elles, alors que l'esclavage fait l'objet de nombreuses remises en question de par le monde et soulèvements, généralement sanglants.

Tour à tour aboli ou rétabli, au gré des pressions économiques, politiques et raciales, ces remous n'épargnent pas la Guadeloupe où vivent des Blancs, des Noirs libres et des esclaves.

C'est dans la propriété de Mathieu de Deauville que le récit d'Hervé Madaya se centre, entre 1790 et 1803, mais plus largement entre 1760 et 1850 car il accompagne son histoire de nombreuses allusions historiques avérées.

Cette exigence de véracité historique m'a beaucoup plu, et me semble même nécessaire pour tous ceux qui, comme moi, ne connaissent pas bien cette " partie " de l'Histoire de l'esclavage, que ce soit depuis la prise en Afrique, jusqu'aux différents points de vente, et ici aux Antilles.

Mais, bouleversant la chronologie au début du roman, cela m'a demandé de relire certains passages.

Ainsi, nous faisons connaissance avec Ana-Laura, épouse de secondes noces de Mathieu de Deauville, de vingt ans son aîné, riche, autoritaire, violent.

Bien que fille d'un esclavagiste espagnol (Señor Ignacio), ayant toujours vécu à Paris, elle ne partage pas les vues de son mari et espère pouvoir l'influencer.

Elle se lie d'amitié avec Da-Sylva, née Yaté, arrivée à Trois-Rivières en 1792 et qui est domestique de maison.

Mathieu de Deauville réprouve ce lien mais n'arrive pas à le rompre.

Sur la plantation, de nombreux couples d'esclaves se forment.

C'est ainsi que Da-Sylva et Mongo tombent amoureux.

De nombreux enfants naissent, bien qu'il soit " conseillé " aux mères de ne pas s'attacher à eux, car valeur marchande gratuite, ils peuvent être vendus à tout moment.

Mais avec eux, en dépit de cela, une force naissait...

Les deux enfants, nés à quelques mois d'intervalle, une fille (Meggy) pour la première, un garçon (Petit-Jean) pour la seconde, passent tout leur temps ensemble, protégés par leurs mères et éduqués dans le respect de l'autre.

Jusqu'à ce que la réalité de leur vie et de leurs conditions les rattrape...

Sauront-ils, pourront-ils y échapper, aller au-delà ?

Hervé Madaya nous immerge dans une histoire qui exacerbe notre sensibilité.

La photographie de couverture (issue du Monument aux Esclaves, Stone Town, à Zanzibar en Tanzanie) est vraiment dure et est à l'image des sous-entendus du livre. Car si nous imaginons les exactions, elles ne sont pas toutes décrites, et c'est très bien ainsi.

Un roman intéressant, et sans doute nécessaire tant les conséquences de l'esclavage sont toujours palpables, quelque soient leurs formes actuelles.

Merci aux Editions Les Points sur les i

Ce roman participe au Challenge d'Enna " African American History Month" (certes, il ne se déroule pas aux Etats-Unis mais les changements qui s'y déroulent impactent les Îles, dont la Guadeloupe).

Belles lectures et découvertes,

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