Louise et le vieil homme

Par Loulou Coco
Louise et le vieil homme, enquête au cœur du Vieux-Lille de Marc Le Piouff, paru en 2016, dans la collection Polars en nord junior, chez Ravet-Anceau

Depuis quelques temps, je vous présente progressivement mes trouvailles du salon du livre jeunesse de Sainte Odile (L’abominable écrivain ou encore le magazine Georges), auquel je me suis rendue il y a quelques mois, et aujourd’hui c’est au tour d’un énorme frisson pour moi. Petit livre, court, qui ne paye pas de mine et qui a pourtant chez moi énormément fait écho et qui m’a touchée plus que prévu.

Un été dans le Vieux-Lille, ce n’est pas reposant ! Louise en sait quelque chose, ses parents tiennent une brasserie rue de Gand. Au milieu des estaminets bondés et des touristes envahissants, la jeune fille remarque une nouvelle tête : un garçon mystérieux dont les grands yeux sombres semblent tristes. Qui est-il ? Que renferme la vieille boutique qu’il habite ? Et qui est ce vieux monsieur dont il prend tellement soin ? Aidée de son fidèle ami Petit Robert, Louise tente d’en apprendre davantage sur ce garçon.

Ce roman a fait écho de diverses façons chez moi. Attention, je dévoile ma vie perso accompagné de quelques spoils sur le bouquin.

D’abord, si vous nous suivez depuis un moment, vous avez compris que je m’appelle Louise (et j’ai eu droit à une super dédicace bien perso pour ça).

Vous avez aussi probablement intégré que Coco et moi on est du Nord. Personnellement, je viens du coin de Lille et je connais particulièrement bien le quartier du Vieux-Lille, notamment la rue de Gand, mon papounet travaillant sur la Place Louise de Bettignies, où la rue de Gand débouche. C’est donc un quartier cher à mon cœur et lié à mon enfance.

Ensuite, il y a un personnage bien spécifique qui m’a complètement chamboulée : le vieux monsieur dont prend soin le mystérieux garçon, qui est son petit-fils. Sans vous faire un gros spoil, car on le comprend très vite, je peux vous dire que cet homme est atteint d’Alzheimer. Maladie dans laquelle est aujourd’hui profondément enfoncé mon propre grand-père. Mais ça va encore plus loin. Cet homme de la rue de Gand et sa famille ont fui leur pays, il y a un peu plus d’un demi-siècle, à cause de la révolution. Mon propre grand-père ne vient pas du même pays, mais a vécu la même situation et s’est retrouvé en France à cause des tensions en Egypte à son époque. Mon grand-père peignait énormément et sa maison est couverte de ses œuvres. Dans le roman de Marc Le Piouff, c’est la grand-mère qui peignait, mais également des paysages de son pays lointain et ceux-ci recouvrent les murs de l’appartement de Lille. Enfin, les problèmes de successions, je connais aussi.

Sans même aller plus loin dans le récit, dans le fond de l’histoire, de la trame et du style d’écriture, rien que pour tous les points que j’ai cités ci-dessus, je me suis retrouvé happée par cette histoire. Je n’ai pas pu faire autrement que de me laisser complètement transporter par le récit, m’identifiant un peu plus à chaque page, retrouvant des éléments de mon propre quotidien. J’ai réellement frissonné avec ce livre et pour bien d’autres raisons que son côté enquête.

Mis à part ces éléments ultra personnels, qui ne pourront évidemment pas coller à tous les autres lecteurs, et en étant objective tout de même, ce roman policier pour les juniors est vraiment bien ficelé. La petite Louise est attachante (on l’est toutes à ce qu’il paraît :p ), le garçon mystérieux qu’elle rencontre est des plus sympathiques, le lien qui les unit peu à peu est tout à fait crédible et bien amené.

Le mystère qui rôde autour des jeunes et de la famille du garçon est aussi bien engagé, bien suivi et on se prend au jeu sans souci. Je n’aurais peut-être pas été aussi loin en parlant « d’enquête » comme le stipule le titre du roman, ou encore en disant « elle découvre ainsi l’un des plus beaux secrets du Vieux-Lille » mais ce n’est pas bien grave.

Que l’on soit familier de ce quartier de Lille ou non, ce roman peut plaire car cela ne prend pas toute la place. Bien sûr, les enfants vivant non loin seront heureux de reconnaître l’ambiance de cette rue, mais cela ne gêne en rien la lecture du roman pour ceux ne visualisant pas les lieux.

Le récit est court, mais bien écrit, du coup on n’a pas l’impression de sauter des passages ou que cela va trop vite.

J’ai eu un petit coup de cœur pour le compagnon « imaginaire » de Louise. Entre guillemet, car on ne peut pas dire qu’il soit si imaginaire que ça. Petit Robert est en réalité son dictionnaire, à qui elle demande parfois de l’aide pour remettre de l’ordre dans ses pensées, notamment en mettant des mots sur les émotions qu’elle n’arrive pas à décrire. Mais imaginaire tout de même, parce qu’il lui parle et elle lui répond. Leurs dialogues sont drôles, mais aussi très éducatifs. Sans en avoir l’air, le roman explique aux jeunes différents mots parfois un peu complexes, qui rassemblent diverses notions et sont durs à expliquer quand on n’a pas 10 ans. Petit exemple :

« – Tu sais quoi ? Je me sens… Je me sens… C’était quoi le mot d’hier soir déjà… Je me sens démunie, voilà !

– Aïe ! réagit aussitôt Petit Robert.

– Quoi, aïe ?

– Eh bien… C’est un mot fort tu sais.

– Ah oui… Trop fort ? Ce n’est pas bon ?

– Non ! Tous les mots sont bons. Ça dépend juste du contexte dans lequel on les utilise. Tu te sens démunie parce que ce garçon reste encore mystérieux et tu ne sais pas comment faire pour qu’il devienne ton ami. »

En bref, ce roman a plus d’un atout dans sa manche pour faire craquer petits en grands !

Bonne lecture les loulous !