Huck : le bon samaritain de mark millar et rafael albuquerque

Par Universcomics @Josemaniette
Mark Millar n'est pas un réel inventeur de concepts, son vrai grand talent est celui de savoir faire la synthèse de ce qui existe déjà, pour en présenter une version moderne et attachante, avec un regard clairement porté sur une possible adaptation au cinéma, ou à la télévision (Netflix venant d'acquérir l'étiquette MillarWorld, attendez-vous à certaines séries inévitables). Ce nouveau personnage en librairie chez Panini, Huck, est ainsi un hommage appuyé à Superman, né (selon les dires de Millar) quand le scénariste a vu, dans le film Man of Steel, le héros tordre le cou à son adversaire, brisant ainsi la règle tacite du justicier qui ne franchit pas certaines limites déontologiques. Du coup, le véritable Superman bon et naïf, c'est du coté de Huck qu'il va se trouver. Orphelin et adopté par tout un village dont il est devenu le bon samaritain attitré, le jeune homme (34 ans tout de même) travaille dans une station service, et met son physique appréciable au service de toutes tâches qu'on lui confie. Huck est simple, voire même simpliste, de premier abord. A la différence d'un Superman qui combat les aliens et assume la posture d'un demi Dieu, ici le gaillard intervient pour descendre le chat qui s'est égaré trop haut dans un arbre, et accomplit une bonne action chaque jour Mais Huck peut aussi intervenir dans des situations bien plus tragiques, comme le sauvetage d'innocentes en Afrique, prises en otages par les terroristes de Boko Haram. D'ailleurs il s'agit du point de départ d'une nouvelle existence, celle de la révélation au grand jour, par les médias. Rien ne sera plus comme avant pour celui dont les pouvoirs fabuleux s'accordent avec un sens du bien et de la générosité dont certains tentent de tirer profit, et dont l'outing est la conséquence de la langue trop pendue d'une certaine Diane Davis, nouvelle arrivante au village, qui rabat les cartes sans imaginer la suite... Huck a un talent incroyable, celui de retrouver ce et ceux qui manque, qui ont disparu. Et Millar a le talent de nous faire retrouver les sensations d'antan, celles d'une Amérique désuète, peut-être fantasmée, mais qui est ici mise à l'honneur avec style et mélancolie. Certains ont fait la fine bouche devant cette american way of life dégoulinante de bons sentiments, face à ce Huck toujours souriant, cette masse de muscles positive, qui inspire la confiance jusque dans le moindre trait. En opposition, le méchant de l'histoire, le Professeur Orlov, a droit à une stigmatisation évidente, tout devant être compréhensible et flagrant au premier coup d'oeil. Alors oui, ce n'est pas le comic-book le plus subtil et moderne du genre, mais c'est également pour cela que ça fonctionne, le contraste avec ce qu'on découvre en temps normal, l'hémoglobine et l'ironie omniprésentes. D'ailleurs Huck est une antithèse parfaite au Nemesis de Millar, cette oeuvre paroxystique et probablement surévaluée, où le sang coule sans raison, où le cahos est erigé en forme artistique.
Rafael Albuquerque au dessin est absolument bluffant. Un talent invraisemblable, au service d'une coolitude et d'une simplicité formelle qui flirte avec celle de Tim Sale, baignée d'une lumière claire et pastelle, qui contribue fortement à l'ambiance feel good de ce récit qui irritera forcément ceux qui voudront y trouver un poil de sarcasme. Parfois les fonds de case sont vite expédiées, mais cela reste un défaut mineur, qui n'entache pas réellement la qualité de cette parution. 
Huck se lit assez vite, le sourire aux lèvres. Au coeur de l'été, c'est une bouffée de fraîcheur sans violence ostentatoire, où le colosse de l'histoire cache un coeur en or et un capital sympathie inné. Pour peu qu'on désire s'en tenir à ces qualités, sans trop fouiller derrière le décor, Huck peut faire passer un fort agréable moment. 


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