De la liberté, de John Stuart Mill (chap 1 et 2)

Par Deuxpourune

Bonjour à tous !

Aujourd’hui je continue sur ma lancée de l’année en vous copiant ici l’une de mes fiches de lecture de philo. L’occasion j’espère de vous donner envie de découvrir quelques philosophes (qui restent accessibles quand même) comme aujourd’hui John Stuart Mill. Je n’ai lu que les deux premiers chapitres (les deux premières parties en fait) de son livre De la liberté qui traitent essentiellement de la vision de la liberté de Mill et de la liberté d’expression. Notre prof nous l’avait fait lire car on est en année électorale et, même si cette fiche de lecture reste très scolaire, je vous encourage à la lire car les idées de Mill sur la liberté d’expression sont très intéressantes, et surtout à mon sens nécessaires : il suffit de regarder un débat politique télévisé pour comprendre que certaines de ses idées visaient justes (enfin il ne s’agit que de mon avis ).

Courte biographie de l’auteur :

John Stuart Mill est né le 20 mai 1806 à Londres et est mort le 8 mai 1873 à Avignon. Philosophe et économiste britannique, il a été l’un des penseurs libéraux les plus influents de son temps et a écrit des textes engagés sur l’économie, la liberté, la démocratie ou bien le féminisme parmi lesquels Principes d’économie politique (1844), De la liberté (1859), De l’assujettissement des femmes (1860) ou des Essais sur Tocqueville et la société américaine.

Chapitre 1 : Introduction

J-S Mill débute en expliquant qu’il va parler dans son essai de la liberté sociale ou civile plutôt que du libre-arbitre et plus précisément de « la nature et les limites du pouvoir que la société peut légitimement exercer sur l’individu ». En effet il s’agit là d’une question qui divise toute l’humanité et que l’on pourrait simplifier en se demandant s’il vaut mieux vivre sous une dictature ou sous une démocratie. Là-dessus J-S Mill a une réponse originale puisque selon lui les gouvernements autoritaires conviennent aux « barbares » et les hommes évolués doivent, eux, vivre en démocratie. Il explique ensuite que le pouvoir des gouvernants est ressenti à la fois comme nécessaire et extrêmement dangereux : comme une arme qu’ils peuvent retourner contre leurs sujets et contre leurs ennemis extérieurs. Il montre ainsi que c’est pour cela qu’on a voulu que les dirigeants soient issus du peuple pour que leurs intérêts et leur volonté soient les intérêts et la volonté de la nation. Mais il explique ensuite que le problème est que les gouvernants issus du peuple ne le sont finalement pas toujours (voire très rarement) et que progressivement la classe gouvernante se différencie de la classe gouvernée (ce que l’on peut reprocher aujourd’hui aux énarques en France par exemple).

J-S Mill montre ensuite les problèmes que pose la « tyrannie de la majorité », en effet la majorité impose à la minorité ses décisions et est dangereuse car elle applique toujours les décisions qu’elle prend. En fait J-S Mill veut trouver le juste milieu entre indépendance individuelle et contrôle social : « l’objet de cet essai est de poser un principe très simple, fondé à régler absolument les rapports de la société et de l’individu dans tout ce qui est contrainte ou contrôle, que les moyens utilisés soient la force physique par le biais de sanctions pénales ou la contrainte morale exercée par l’opinion publique. Ce principe veut que les hommes ne soient autorisés, individuellement ou collectivement, à entraver la liberté d’action de quiconque que pour assurer leur propre protection. »

J-S Mill explique donc que l’Etat doit permettre la liberté de l’individu, tant qu’il n’entrave pas la liberté des autres.  Or la société impose en permanence à ses membres ses notions de perfection personnelle ou sociale et les dirigeants veulent souvent imposer leur manière de penser aux citoyens. Cependant la liberté de pensée reste la morale politique de tous les pays qui se disent tolérants et ont des institutions libres. J-S Mill en déduit donc que les fondements tant philosophiques que pratiques de la liberté d’expression ne sont donc pas si connus que cela.

Chapitre 2 : De la liberté de pensée et de discussion

J-S Mill rappelle que la liberté de la presse, même si elle est parfois un peu malmenée, n’est jamais remise en question dans les pays démocratiques. Il affirme ensuite que ni l’Etat ni le peuple ne doivent jamais exercer de pouvoir de coercition et que si tous les hommes moins un partageaient la même opinion ils ne devraient pas avoir le pouvoir d’imposer le silence à cet homme-là.

Il affirme ensuite que réprimer une opinion revient à « voler l’humanité ». En effet si l’opinion est juste on enterre la vérité et si l’opinion est fausse on empêche la vérité de s’exprimer et de démontrer pourquoi elle était fausse.

Lorsque les hommes cherchent à supprimer une opinion qui est vraie ils pensent généralement que leur certitude est absolue et a donc valeur de vérité : ainsi ceux qui la contestent ne devraient pas avoir le droit de trancher pour tout l’humanité.  Pour J-S Mill les hommes oublient dans ces cas-là qu’ils sont faillibles, à l’image de princes incontestables. Mais si le jugement des hommes est faillible, faut-il pour autant les empêcher d’exercer ce jugement ? Pour J-S Mill il faut que tout le monde puisse s’exprimer, au risque de se tromper car s’ils usent de leur raison les hommes agiront ensuite du mieux qu’ils pourront. Il faut donc présumer juste son opinion raisonnée sans l’affirmer comme étant une vérité absolue. En effet l’homme par la discussion et l’expérience peut corriger ses erreurs. En ce qui concerne la liberté de pensée, la discussion est essentielle pour J-S Mill. Il faut accorder de l’importance aux opinions des autres, savoir écouter, pour trancher et estimer vraie son opinion ou non. En fait, il s’agit d’une forme de sagesse que décrit ici J-S Mill. Il poursuit ensuite en disant qu’ainsi on ne peut pas imposer une religion à un autre que soi (on retrouve la liberté de culte) car les croyances relèvent de l’opinion et doivent donc être discutées.

J-S Mill s’attaque ensuite à l’opinion généralement répandue que « la persécution est une épreuve que la liberté doit subir, et qu’elle subit toujours avec succès, puisque les sanctions s’avèrent toujours impuissantes contre la vérité ». Il affirme en effet que l’apport d’une opinion nouvelle ne doit pas être persécutée mais discutée et que les persécutions ont plus d’une fois bâillonnée la vérité.

Il poursuit en expliquant que l’intolérance empêche la liberté de pensée et d’opinion car elle incite les hommes à taire leurs opinions par peur d’être stigmatisés et qu’à terme elle diminue l’intelligence des hommes et qu’il y a moins d’hommes courageux moralement. De plus pour lui l’intelligence doit permettre de prendre conscience des fondements de nos opinions personnelles : il faut connaitre les opinions des adversaires pour défendre les siennes.

De plus il y a un danger à ne pas remettre en question nos croyances et a les admettre comme allant de soi au fil des générations, ainsi au fur et à mesure les doctrine perdent de leur sens et ne sont plus observées.

Enfin il s’intéresse au fait que parfois les deux opinions en conflit ont chacune une part de vérité et une part d’erreur et il souligne que « seule la diversité donne une chance équitable à toutes les facettes de la vérité » : ainsi la vérité perdrait quelque chose si les dissidents se taisaient.

Il termine ensuite son chapitre en récapitulant les quatre raisons distinctes de la nécessité de la liberté de pensée qu’il a exposées :

  • Une opinion qu’on réduit au silence peut très bien être vraie.
  • Même si l’opinion réduite au silence est fausse, elle peut contenir une part de vérité.
  • « Si l’opinion reçue est non seulement vraie, mais tout la vérité, on la professera comme une sorte de préjugé, sans comprendre ou sentir ses principes rationnels, si elle ne peut être discutée vigoureusement et loyalement ».
  • Ainsi sans discussion le sens de la doctrine sera en danger, le dogme deviendra une simple profession formelle.

Mon avis : De la liberté est un livre que j’ai trouvé plutôt intéressant. Les idées de J-S Mill sont bien détaillées et constructives. La place qu’il accorde à la liberté dans un Etat est encore en avance pour son époque et on comprend qu’il a énormément influencé le libéralisme politique. Ensuite c’est peut-être parce que ses idées ont eu un impact très fort sur nos démocraties actuelles, mais je ne les ai pas trouvées révolutionnaires. Finalement il énumère beaucoup d’idées auxquelles tout le monde ne peut que se rallier (on est tous d’accords pour discuter, écouter les autres, se débarrasser des oppressions…enfin, sur le papier !) mais n’innove pas complètement. Rien de foncièrement différend de ce que propose Locke ou les Lumières par exemple. Son message de tolérance reste important mais on comprend que c’est une tolérance soumise à conditions (il trouve manifestement certains peuples trop barbares pour y avoir droit).

Son message, notamment sur la liberté d’expression est essentiel car il montre à quel point il est important que toutes les voix puissent s’exprimer. Sa réponse à la question qui a beaucoup divisé après les attentats (Devrait-il il y avoir une limite à la liberté d’expression ?) serait donc certainement non. Il faut que les extrémistes s’expriment et qu’il y ait des personnes en face pour montrer en quoi ce qu’ils disent est faux.

Malgré cela je vous avoue m’être souvent ennuyée pendant cette lecture, le discours de Mill reste très bien-pensant et influencé par la morale protestante. Et rapidement son discours tourne un peu en rond (il explique finalement en cent pages ce qui tient en quatre).

C’est donc une lecture que je vous recommande car elle véhicule des idées fortes et importantes, même si vous ne serez peut-être pas d’accord avec toutes (la vision de la liberté en politique de Mill fait moins l’unanimité que sa vision de la liberté d’expression par exemple ) !

N’hésitez pas à me dire si cet article vous a plu ou plutôt ennuyé ! Avec Mlle Jeanne nous restons ouvertes à toutes vos remarques et avis !

Yoko