C’est le 1er, je balance tout (#5, juin 2017)

Par Lupiot

Cinquième édition de ce nouveau rendez-vous mensuel, qui rime avec " C'est lundi, que lisez-vous ? ", et peut se voir comme un complément ou un petit frère dérangé, comme il vous plaira. Je vous invite à l'adopter, il ne mord pas.

Le principe ? Quatre trucs à balancer !

  1. Le Top & Flop de ce que j'ai lu le mois dernier
  2. Au moins 1 chronique d'ailleurs lue le mois dernier
  3. Au moins 1 lien qui m'a fait " Wahou " le mois dernier (hors chronique littéraire)
  4. Et enfin : ce que j'ai fait de mieux le mois dernier
1) TOP & FLOP

Alors ce mois-ci en tout j'ai lu... des BD et des romans :

Note 1 : oui, j'ai remis Polina, parce que je l'avais à peine entamé le mois dernier.
Note 2 : je suis bien consciente queLes Animaux Fantastique n'est ni une BD ni un roman, mais que veux-tu.

Dans ce lot, 3 coups de cœur (dont 1 énooorme), 1 meh, 1 flop, et...

3 titres dont je vous ai déjà dit du bien
(si tu me lis régulièrement, saute à la case suivante, petit cabris, saute !)

  • Polina, de Bastien Vivès, chez Casterman. Maintenant que je l'ai fini, je peux développer un peu : c'était beau et touchant. Le trait de Bastien Vivès, sa façon de saisir les émotions dans le rien du tout d'une posture ou la gestion des contrastes, m'a beaucoup plus. Un passage magnifique vers la fin de la BD, quand Polina retrouve son ancien professeur de danse, est à vous coller la chair de poule. (Petit spoiler scénique)
    Toute l'admiration que l'héroïne a pour cet homme passe par le dessin : en quelques cases, on voit comment Polina le voit (immense, solide, beau brun) et comment il est réellement (vieilli, fatigué, affaibli), et ce sans un mot. Bref j'ai envie de lire la nouvelle BD de l'auteur, Une sœur.
  • L'Île aux mensonges, de Frances Hardinge, chez Gallimard Jeunesse. Mais siiii, rappelez-vous... Je vous en ai parlé dans le tout premier " C'est le 1er " en vous cassant les oreilles sur 4 longueurs de scroll tandis que vous tentiez de lever la tête pour respirer. Je l'avais lu en anglais ; la VF est aussi réussie même si, à la relecture, IL EST VRAI que PEUT-ÊTRE certains dialogues sont un rien poussifs/didactiques (coucou Bloup). Mais c'est un problème minime. Ce roman est EXCELLENT, OK ? Chu prête à monter sur le ring. *secoue ses bras mous*
  • Saga, de Vaughan et Staples, chez Urban Comics, dont je viens de lire le tome 7 tout juste sorti d'impression
Comment ? Cela fait approximativement 8 fois que je mentionne cette série ? Curieux.
Enchaînons avec élégance et naturel sur mon :
TOP (3) #1. Pereira prétend, Pierre-Henri Gomont, adapté du roman de Tanibucchi (Sarbacane, 2016) Le dessin est d'une finesse évocatrice qui fait comme des petites bulles de champagnes dans la gorge. C'est immédiatement (dès les premières pages), touchant. L'interprétation graphiques est sublimes, le travail d'ambiance, sur les couleur, terriblement réussi. Plein de passages sont magnifiques, tant pour le texte que pour l'image. #2. La Passe-Miroir 3. La mémoire de Babel, de Christelle Dabos (Gallimard Jeunesse, 2017) Fantastique tome 3 de cette série que nous adorons, sur Allez Vous Faire Lire, comme en témoigne la quantité disproportionnée d'articles consacrés à la saga. J'ai eu un gros, magnifique coup de cœur pour cette bande-dessinée. (Je n'ai pas lu le roman dont elle est adaptée, je le ferai peut-être.) Dans un Portugal Salazariste, elle suit le personnage de Pereira, journaliste plan-plan en hibernation émotionnelle et intellectuelle depuis la mort de son épouse, qui voit sa vie de patapouf secouée par l'arrivée d'un jeune écrivain révolutionnaire, naïf et gamin, dans son quotidien. C'est la prise de conscience politique progressive de ce personnage qui nous est contée ici, avec une pudeur, une douceur et une tendresse simples et belles.
  1. Critique du tome 1, Les fiancés de l'hiver
  2. Critique du tome 2, Les disparus du Clairdelune
  3. Liste de recommandation si vous avez aimé La Passe-Miroir
  4. Entretien avec Christelle Dabos
  5. Critique énamourée du tome 3 à venir (of course) (jouez pas les surpris)
Ce tome 3 voit l'auteure déployer tous ses talents de conteuse et l'intrigue avancer à pas de géant - alors même que la relation entre Ophélie & Thorn est toujours aussi ahem *compliquée* (ben oui, forcément, y z'ont du mal à s'exprimer, les deux loustics...). C'est néanmoins un délice de les voir apprendre de leurs erreurs. La fin est sublime, intrigante, émouvante et terriblement satisfaisante. Pour rappel, le tome 3 est l'avant-dernier de la saga, prévue depuis le début comme une tétralogie. #3. Inséparables, de Sarah Crossan (VO 2015, VF Rageot 2017) Inséparables est un beau roman en vers de Sarah Crossan, auteur jeunesse anglaise dont c'est la spécialité. Il est ici traduit par Clémentine Beauvais, auteur jeunesse française dont ce n'est pas la spécialité mais qui a tout de même écrit le plus beau roman en vers de tous les temps, Songe à la douceur, paru en 2016 - roman dont le succès est probablement à l'origine de cet intérêt soudain de Rageot pour les romans en vers jusqu'ici réputés invendables. Bref de quoi je parlais, avec mes phrases interminables ? Inséparables, c'est l'histoire de deux sœurs siamoises, racontée par l'une d'elle. C'est une histoire d'amour. C'est tout ce que t'as besoin de savoir. ❤ Je vous invite à lire la très belle critique d'Inséparables publiée par Tom, de La Voix du Livre. MEH (1)
Ni Top ni Flop
Lone Sloane, de Lob et Druillet (Dargaud, 1972)
Pourquoi c'est super ? Les planches sont totalement hors de ce monde. C'est magnifique, onirique, violent, psychédélique : les couleurs et les univers rappellent le Mœbius d'Edena ; le gaufrage (le découpage des cases) est envoûtant, quand il n'est pas totalement pété. Graphiquement, c'est de l'excellente came. FLOP (2) #1. Maresi, de Maria Turtschaninoff (2015, VF Rageot 2017) : ce roman de fantasy nordique assez original suit une jeune fille (Maresi, donc) qui intègre l'Abbaye Écarlate, lieu privilégié d'enseignement pour les jeunes filles. Dans ce monde frappé par les guerres, la famine, et très dur envers les femmes, c'est le seul espoir de Maresi d'avoir une vie épanouie et instruite. Malgré ça, Maresi m'a rasée, pour deux raisons : La fin me pose plusieurs problèmes aussi, mais bref. Bilan : malgré de bonnes intentions, une caractérisation positive de l'héroïne et une plume plutôt agréable, je reste sur une impression gluante. Roman mal construit, selon moi, et qui se nourrit d'une certaine fascination du pire.

J'aime à la folie le petit monde brisé d'Ophélie, original, renversant, plein de fantaisie et poésie, à la frontière du steampunk et de l'épopée fantastique. Je suis terriblement attaché à plusieurs de ses personnages si inhabituels, nuancés et brillamment écrits. (Enfin des romans qui font de la place aux timides !) J'adore l'héroïne forte mais pas kick-ass, une discrète, une handicapée de l'expression orale, une jeune fille au cœur en hibernation qui se pose trop de questions, une petite souris qui n'ose pas dire un mot plus haut que l'autre même quand elle boue à l'intérieur... et qui évolue ! Qui grandit ! Qui apprend à accepter ses forces et ses faiblesses, sans jamais se trahir...

Comme cette BD. 2) CHRONIQUES D'AILLEURS


Et pourquoi c'est bof ? Bahhhh l'histoire... C'est mal fichu, les rebondissements tombent à plats, et c'est très répétitif.
Clairement, on n'est pas là pour le scénario, mais tout de même, en tant que bande-dessinée (format narratif), du coup, Meh ! (J'aurais mieux vu les pleines pages de Druillet dans un beau live, sans contexte.)

  1. Problème accessoire : le portrait général des hommes, qui sont tous résolument macho, cruels et ultraviolents (à part le frère gay ? merci), forçait tellement le trait que c'en devenait d'abord pesant, ensuite énervant.
  2. Problème principal : purée, le ryyyyythme ! La quatrième de couverture est obligée de racontée les deux tiers du roman, ET POURQUOI ? Parce que l'élément perturbateur arrive quand je me suis endormie dans mon porridge ! Sérieusement, on passe la première moitié du roman à apprendre des trucs sur les plantes et la cuisine locale en se baladant dans les hautes herbes, c'est un peu joli et poétisant mais ça se traîne comme un après-midi chez mémé, puis premier sursaut du scénario vers la moitié du texte (annonce d'une menace)... Eeeet la menace prophétisée (= les hommes) n'arrive pas avant le DERNIER QUART du roman. Je suis noyée dans mon porridge depuis 2 jours, à ce stade, et ça commence à sentir.

#2. The Wicked and the Divine, de Kieron Gillen et Jame McKelvie (2014-présent, Glénat pour la VF) : attrapée en librairie à cause des avis positifs surnombreux de mon onglet blog favoris (je dis bien à cause (vous savez que je vous aime hein)), cette bande-dessinée ne m'a pas convaincue : les dessins sont assez plats et ordinaires à mes yeux, ils manquent de corps, de relief dans les traits, et les dialogues ne brillent pas par leur vivacité, leur rhétorique ou leur humour - voire, ils sont carrément mal écrits - ce qui fait tout de même déjà deux raisons de lui envoyer des boulettes de pain de mie, à cette BD. Là où The Wicked and The Devine accroche (ou pas) son lecteur, c'est sur son pitch un peu dingue de dieux réincarnés dans de jeunes vedettes (mon dieu, j'utilise le mot vedette, j'ai 75 ans). Pas renversant non plus, on joue sur des codes de fantasmes à la mode, mais why note, ç'aurait pu être de la bombe, bébé. Sauf que moi, les paillettes, la téléréalité, les scénarios téléphonés, toussa, ça m'ennuie.

3) AILLEURS SUR LE WEB

Je réalise avec horreur que je n'ai jamais parlé du blog La ronde des livres, tenu par Lucille.

Ses articles sont souvent brillants, d'une honnêteté intellectuelle absolue, et portés par un esprit de découverte et de partage qui cristallise tout ce que j'aime dans la blogosphère. Aussi vous le recommandé-je chaleureusement. Par exemple, son dernier article : " Esprit de suite, 4 tomes 2 à découvrir" fait un focus sur les suites, qu'on oublie trop souvent de chroniquer, par manque de temps et par attrait de la nouveauté (tels les petits papillons de nuits fragiles et idiots que nous sommes).

4) HAPPY NOMBRIL

Pis, c'est un peu à cause d'elle que j'ai acheté Le Projet Starpoint. (Clique pour lire sa chouette chronique !)

Plein de choses intéressantes ont retenu mon attention ce mois-ci, mais je vais m'en tenir au chiffre drastique, impitoyable et minuscule de deux recommandations :

  • 1. La charge mentale. Si vous n'avez pas savamment esquivé tous les réseaux sociaux depuis 12 jours, vous avez vu passer la bande-dessinée " Fallait demander " de Emma, qui explique le phénomène social de la charge mentale.Personnellement, lire cette BD m'a fait un bien fou car elle m'a permis de mettre des mots sur ce truc qui me rendait folle (je veux dire, d'autres mots que ceux du Capitaine Haddok).
  • 2. Les différences entre la littérature jeunesse et la littérature adulte, explorées avec sagacité par notre expatriée préférée, Clémentine Beauvais. En partant de l'exemple de son roman Songe à la douceur, très crossover, elle répond à la question " Mais pourquoi vous dites que c'est un livre jeunesse ? " dans une réflexion à la grecque, pleine de bouts croquants de vérité, de répliques savoureuses et de piques acidulées. Ça s'appelle " Aucune différence ou presque : littérature jeunesse et littérature adulte."

Ok, bon, il est temps. Quand je vous disais que ça bougeait côté professionnel... J'ai commencé à mon nouveau poste. Je quitte le free-lance pour le job de mes rêves :

PS : si t'as pas compris, c'est ma trombine.

Côté blog, j'ai accueilli deux nouvelles chroniqueuses prometteuses, Stern et Patatita, petits animaux charmants qui ont fait leurs premiers pas excités sur le blog :

PS : J'ai un problème avec la grenouille qui me sert à rapatrier tous les liens. Ça fait si longtemps que je m'énerve dessus qu'actuellement, si elle était en chair et en batracien, je ne me porterais pas garante de sa préservation physique. Du coup, plutôt que de me mettre à la vivisection rageuse sur la première victime qui passe, je renonce pour le moment et, avec une fausse sérénité Feng Shui, je range mon ordi dans le tiroir de mon bureau. Merci de votre compréhension envers ma lose technologique. En attendant, si vous le souhaitez, vous êtes libre de me communiquer le lien de votre " C'est le 1er " par d'autres moyens, commentaire ou message (ici ou sur Facebook), et j'essaierai de mettre cette grenouille à sa place demain.

Les accompagner dans la structure, relecture, mise en page de leurs articles a été très enthousiasmant (comme le sont toujours les activités que l'on partage avec des gens brillants). Et, accessoirement, c'est pour moi l'occasion de donner libre court à ma folie GIFesque sur des articles que je n'ai même pas eu à rédiger - j'ai l'impression de manger le glaçage sans le gâteau, tu sais, le truc enfantin que t'as pas le droit de faire mais qui est tellement jouissif qu'au diable les punitions, tu y vas direct avec les ongles.

Vous en déduirez que je poursuis mon entreprise de domination du monde. Mon but avoué est de vous faire acheter, emprunter et lire plein de livres.

CHEERS !