Chronique « Jeux d’ombres, tome 2 »
Scénario de Loulou Dédola, dessin et couleurs de Merwan,
Public conseillé : adultes / grands adolescents (à partir de 16 ans),
Style : Polar, Thriller,
Paru aux éditions Glénat, le 18 janvier 2017, 14.95 euros,
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L’Histoire
Cengiz, fils d’immigré turc est un charismatique leader de la banlieue lyonnaise. Il prépare avec la belle Viviane le forum pour l’emploi “Jeune Forum”. La miss suggère d’y inviter des DRH des grandes entreprises de la région, mais Cengiz a d’autres sujets en tête… Contrairement à ce qui a été annoncé à la télé, il sait que son frère Sayar, ex-caïd de la cité, est bien vivant.. et de retour.
Contraint d’assumer ce lien familial, il lui passe une voiture et du blé. Le soir venu, Sayar retrouve sa “copine”, tandis qu’elle “lève” un client arabe. Il la saute dans la voiture et va se planquer dans son studio, juste le temps de descendre une bouteille et de récupérer son flingue…
Ce que j’en pense
Ca ne traine pas pour Merwan (dessin) et Loulou Dedola (scénario). Les auteurs finissent à fond les ballons leur mini-série policière contemporaine, dans la veine de “The Wire” (de David Simon). Dédola construit un récit hyper-réaliste, qui nous jette dans le bordel des banlieues chaudes, entre communautés turques et arabo-musulmanes qui s’affrontent. Mafia, vols, recels, drogues, le quotidien n’est pas tendre…
Loin de cet esprit là, Cengiz, charismatique jeune issu de l’immigration Turc, est un garçon plein d’avenirs. Médiateur efficace et respecté des deux communautés, Cengiz sait parler à tous, même quand la la tension monte entre cités et flics.
Inspiré par l’esprit de Attaturk, le grand humaniste turc, il se décrit comme laïc avant tout. Mais sa vie bascule avec le retour au bercail de son frère Sayar, que tout le monde croit mort. Ultra violent, Sayar a besoin de lui, de son fric et ne songe pas une seule seconde aux dégâts qu’il peut produire dans sa vie… Violence gratuite, braquage, le chien enragé ne se calme pas !
Constitué en 4 chapitres centrés autour d’un personnage (les deux frères et les deux femmes dans leur sillage), Loulou a construit un scénario dense et humain. S’inspirant de son expérience dans la banlieue lyonnaise, il nous plonge dans une fiction qu’on peut aisément imaginer véridique… Les personnages sonnent vrais et complexes. Seul bémol, le découpage est extrêmement dense (on compte facilement 15 cases par planches). Ce qui nuit à la lisibilité de l’ensemble.
Au dessin, Merwan assure une belle prestation. Malgré la haute densité de la mise-en-scène, l’ambiance et les personnages sont posés avec efficacité. Entre les immigrés turcs et les arabes, je n’ai (presque) pas eu de problème à identifier qui est qui ? Ce n’est pas évident en BD, avec un trait minimaliste comme le sien. J’ai pris un vrai plaisir à lire ce polar contemporain et désenchanté et à me glisser dans la vie (pas rêvée du tout) de Cengiz.