Le Père Goriot [Honoré de Balzac]

Par Charlotte @ulostcontrol_
Hello,
Peut-être le savez vous déjà, mais je n'ai découvert Balzac que cette année seulement, avec Eugénie Grandet. Voulant continuer sur cette lancée tout en profitant des avantages de ma liseuse, j'ai récemment lu Le Père Goriot.

« Cette pièce est dans tout son lustre au moment où, vers sept heures du matin, le chat de madame Vauquer précède sa maîtresse ; saute sur les buffets, y flaire le lait que contiennent plusieurs jattes couvertes d'assiettes, et fait entendre son rourou matinal. Bientôt la veuve se montre, attifée de son bonnet de tulle sous lequel pend un tour de faux cheveux mal mis, elle marche en traînassant ses pantoufles grimacées. »
Combien de fois n'ai-je pas étudié cet extrait ? Il m'est maintenant tellement familier que j'ai l'impression de le connaître par cœur. Les premiers mots de la première phrase sonnent comme une comptine, presque comme une prière que j'aurais apprise par cœur étant petite et que je réciterais maintenant les yeux fermés, à la fois happée par le rythme de la phrase et agissant comme un automate rouillé qui n'aurait que trop ressassé ces quelque mots. Madame Vauquer, je ne la connais que trop bien : elle, ses pantoufles et son chat, son austérité et sa vanité me sont presque plus familiers que certains membres de ma famille.
Mais que serait-elle sans Vautrin, Rastignac, le Père Goriot et les deux filles de ce dernier ? Comment parler de madame Vauquer sans évoquer la gentillesse et l'innocence du Père Goriot, son dévouement sans borne envers ses deux filles ? « Eugène était pétrifié par l'inépuisable dévouement de cet homme », l'attitude méprisante de ces dernières, Delphine et Anastasie ? L'opportunisme naissant de Rastignac ? Les leçons légendaires de Vautrin, et son charme encanailleur ? Le Père Goriot -ou la pension de Madame Vauquer-, c'est un peu tout ça : un joyeux mélange de personnages accablés par leurs vices, des caricatures humaines que l'on se surprend pourtant à reconnaître.
« (...) tout allait pâlir devant les péripéties de cette grande journée, de laquelle il serait éternellement question dans les conversations de madame Vauquer. »

Et puis il y a Balzac, ses remarques savoureuses glissées ici et là, le rythme de ses phrases, son récit monotone, apparemment uniforme mais pourtant dynamique, rythmé et efficace. Ses phrases parfois longues et ennuyantes, ses paragraphes fleuves dans lesquels je me suis souvent perdue -l'impression reste la même que celle que j'avais après ma lecture d'Eugénie Grandet, finalement. Mais plus j'apprends à connaître ses personnages, plus je m'immisce dans leur vie, plus leurs motivations me deviennent familières et compréhensibles. Cette comédie humaine, c'est comme un portrait de famille : il y a ceux qu'on connaît bien, ceux qu'on avait oubliés, et ceux que l'on se contente de croiser occasionnellement.
Si j'ai aimé Le Père Goriot, c'est bien pour l'atmosphère d' « histoire de famille » qui s'en dégage, l'ambiance calfeutrée de la pension, ses habitants farouches. Le Père Goriot y est attachant et suscite facilement la pitié, et les personnages qui l'entourent contribuent à rendre cette histoire intéressante et vivante. Finalement, je dirais que cet opus de Balzac est un excellent premier roman pour appréhender Balzac et mieux connaître son oeuvre : son écriture y est limpide et pourtant caractéristique, et ses personnages emblématiques. Bref, Le Père Goriot est à lui seul un concentré de culture dont on aurait tort de se passer !
« Ici se termine l'exposition de cette obscure, mais effroyable tragédie parisienne. »

Rastignac est un jeune provincial qui cherche à s'insérer dans la société parisienne. Il lui manque les manières et l'argent. Pour parvenir, il côtoie les femmes du monde, mais reste attaché à son voisin de la pension Vauquer, le père Goriot, vieillard malheureux abandonné de ses filles. Vautrin, forçat évadé, Marsay, politicien ambitieux, et Rubempré, écrivain talentueux, sont animés du même désir de pouvoir. Ils apprennent, chacun à leur manière, les complicités et les alliances indispensables dans une société gouvernée par les intérêts. Seules figures du désintéressement : le père Goriot, vaincu par son amour paternel, et Mme de Beauséant, abandonnée du Tout-Paris.

Y a-t-il un roman que vous avez l'impression de connaître par cœur tellement vous l'avez étudié en classe ? Par quel roman de Balzac conseilleriez-vous de commencer ?