Lockwood & Co : L’escalier hurleur

Par Loulou Coco

   Lockwood & Co : L’escalier hurleur de Jonathan Stroud

S‘il n’y avait qu’une seule question à vous poser avant de commencer la lecture de cet article, ce serait celle-ci : croyez-vous réellement aux fantômes ? Si la réponse est oui, alors ce qui va suivre va aussi bien vous terroriser que vous fasciner. Si au contraire, vous pensez que les fantômes ne sont que des attrape-nigauds, des projections d’esprits faibles et torturés, ce qui va suivre devrait quand même vous plaire, parce qu’il est certain que vous mettrez un point d’honneur à prouver que tout ceci n’est que « foutaises ».

Vous l’aurez compris, cette semaine, j’ai décidé de parler fantômes. Depuis des siècles, les spectres envahissent la littérature, sans qu’on sache trop comment cela a commencé. Toujours est-il que de Shakespeare et son Hamlet au Fantôme de l’Opéra de Leroux en passant par Maupassant et son Horla, il est désormais difficile de faire du neuf sur le sujet. Et pourtant, c’est le défi que s’est lancé Jonathan Stroud, auteur qui ne doit pas vous être inconnu puisqu’on en a déjà parlé ici même. Défi relevé ? Certainement !

 De nos jours, le Royaume-Uni est en proie à un terrible problème : les fantômes reviennent en force d’entre les morts pour hanter les demeures et les rues. Gare à ceux qui se font toucher par ces épouvantables apparitions, ils meurent immédiatement. Pour faire face à ce Problème, des agences chasseuses de spectres ont émergé un peu partout. Lockwood & Co, basé à Londres, accueille en son sein une nouvelle recrue : la talentueuse Lucy Carlyle, autrefois promise à une belle carrière, jusqu’à un terrible accident impliquant la mort de ses collègues. Passant sous silence ce détail sordide, elle tente de se faire à sa nouvelle vie de londonienne, et ce n’est pas de tout repos. Entre son (jeune) patron, Anthony Lockwood qui ne prend rien au sérieux, et George, son (non-moins jeune) collègue aux sautes d’humeur particulières, Lucy a bien du mal à trouver sa place. De plus, de par la jeunesse de ses agents, Lockwood & Co a dû mal à attirer de nouveaux clients et renflouer ses caisses.

Casper nous a trompé toute sa vie (mort) : il ne cherchait qu’à contaminer le plus de gens …

Tout bascule le jour où Lucy et Lockwood sont appelés pour « décontaminer » une maison hantée. Rapidement pris au piège par un fantôme particulièrement menaçant, les deux agents n’ont d’autre choix que de mettre le feu à la bâtisse pour s’en sortir, ce qui n’est pas du goût des propriétaires. Ces derniers les assignent en justice et leur réclament une somme faramineuse en dédommagement, somme que l’agence ne possède certainement pas. Mais fort heureusement, un grand magnat industriel, qui a eu vent de leur histoire, leur propose un pacte : s’ils réussissent à passer une nuit dans son manoir plus que hanté et à s’en sortir vivants, il épongera leurs dettes. Lockwood accepte sans l’ombre d’une hésitation. Lucy et George sont aux anges : ils ne leur restent plus que deux jours pour trouver comment survivre à une chambre rouge sanguinaire, un escalier hurleur et une horde de fantômes prêts à tout pour avoir de nouveaux compagnons de jeux. Deux jours, c’est largement suffisant, non ?

Clint représente très bien la réaction des deux agents (les rides en plus)

On suit les aventures de l’agence Lockwood à travers les yeux et l’esprit de Lucy. J’ai trouvé ce choix de narration assez profitable à l’histoire, puisque c’est un personnage qui débarque à Londres et qui n’a jamais vraiment travaillé dans une agence avant, comme nous, du coup, on a un vrai processus de personnification possible. Cette introspection dans l’esprit d’un seul des personnages est très bien menée et elle ne nous empêche en rien de découvrir les autres personnages et de les aimer plus que le personnage principal. Contrairement à ce que j’en disais dans mon article sur la saga de Bartiméus, j’ai beaucoup aimé le style de Stroud. Il était très fluide, l’humour était bien amené et l’action faisait vraie. Tellement vraie que je déconseille aux âmes sensibles de le lire le soir juste avant d’aller se coucher. Surtout si vous croyez aux fantômes.

Déconseillé le soir aux âmes sensibles

Car la vraie force de ce livre, c’est le décor qui y est décrit. Tout parait vrai. On n’a pas d’utilisation excessive de violence ou de phénomène surnaturel. On a pas non plus d’explication sur le Problème dont est victime toute l’Angleterre. Les fantômes ont débarqué, point. Il s’agit maintenant de canaliser le phénomène. Le fait d’avoir offert aux enfants/adolescents le beau rôle d’agents, puisqu’ils sont plus sensibles que les adultes, est également une bonne idée. Car c’est scientifiquement possible. Ne dit-on pas que certains sons échappent aux adultes une fois les 25 ans dépassés ? Et bien ici pour les fantômes, c’est la même chose.

Y a comme qui dirait un petit Problème dans le jardin.
« Plus vous regardez, plus ils apparaissent ».

Concernant l’histoire en elle-même, elle est drôlement bien menée. Les péripéties s’enchaînent vite, on apprend à connaître, et apprécier, les héros et plus que tout, on a pas mal de rebondissements (jusque dans les dernières pages, alors c’est pour dire). Et c’est aussi ce qui fait la force de ce livre. Il ne demande pas forcément de croire aux fantômes pour en apprécier la lecture. Car on peut le lire comme un livre policier. Dès les premiers chapitres, on découvre une énigme sous-jacente à la trame principale et il devient tout aussi excitant de trouver la réponse à cette énigme que de savoir si les héros vont s’en sortir. Je ne vous en dirai pas plus pour ne pas vous spoiler le plaisir de lecture.
Seul bémol, si vous avez l’esprit d’un Sherlock Holmes en herbe, comme moi, vous risquez fort de trouver la solution à l’énigme bien avant son dénouement dans le livre. Pour les autres, cela vous offrira une belle surprise.

Inutile donc de vous dire que j »attends la suite avec impatience, ce qui est devenu rare de nos jours. J’ai vraiment envie d’en savoir plus sur l’histoire de l’agence, sur le rebondissement de fin de tome 1, et sur les héros en général. Pour l’instant, il existe deux tomes, dont seul le premier a été traduit en France. Aucune date de parution n’est encore annoncée, mais nul doute que l’on vous préviendra dès que cela changera.

Alors prêts à affronter les fantômes ? Si vous arrivez déjà à supporter la vidéo bonus, c’est que vous êtes sur la bonne voie.

Le Recap’ :

Points positifs :

  • Un style très fluide, facile à suivre même pour ceux qui n’ont pas l’habitude de lire
  • Une histoire originale avec de très bonnes idées scénaristiques
  • Un décor très réaliste qui donne parfois la chair de poule sans toutefois jamais tomber dans l’horreur sanguinaire pure
  • Un livre à la fois pour ceux qui croient aux fantômes, et ceux qui n’y croient pas

Point négatif :

  • Une énigme sous-jacente peut-être un peu trop simple pour les esprits habitués aux séries télés et aux romans policiers

Bonne lecture les Cocos !


Auteur : Jonathan Stroud
Editeur : Albin Michel (Wiz)
Date de parution : Septembre 2014
Public cible : A partir de 11 ans


BONUS :