Naufrage(s)

Par Henri-Charles Dahlem @hcdahlem

Ma note
★★★ (bien aimé)

Ma chronique

Tempêtes intérieures

Michèle Lesbre signe avec « Naufrage(s) » un texte sur la mémoire et la mélancolie. Partant de ses promenades sur l’île de Sein, elle convoque l’histoire et la géographie pour les transformer en une odyssée intérieure.

Il est de ces livres qu’on lit, puis que l’on reprend. De ces livres qu’on picore, cherchant ici ou là un passage, une citation qui vous a marquée, touchée. Comme celle-ci vers la fin, avec laquelle je pourrais commencer ma chronique. Car elle résume parfaitement le propos de l’autrice. « J’ai dû tout inventer, tout découvrir, pour me construire. Celle que je suis et qui se découvre encore, tardivement, m’étonne parfois, me déconcerte aussi. Je renonce un peu à la connaître vraiment, elle ne cesse de se transformer avec le temps et je me méfie de ses brusques tempêtes. Le bateau sur lequel je me suis embarquée, juste la vie, navigue un peu trop au hasard. C’est fugitif, mais c’est beau, et les rencontres, mêmes brèves, ont quelque chose de rassurant. Quelque part et sans cesse, des vies se croisent et se quittent. Je ne voudrais pas faire marche arrière, je ne voudrais pas oublier le long chemin jusqu’à ce jour, je voudrais seulement qu’il m’aide à être sereine. Le vent de Sein m’a jetée dans mes affres intimes. Il m’a reconnue. C’est pour cette raison même que l’île me bouleverse. »
Une île autour de laquelle flottent les âmes des naufragés,  les souvenirs de voyage et deux personnages inspirants, la Lili du Grand Marin de Catherine Poulain et l’océanographe Anita Conti. Mais nous y reviendrons.
Au fil des années, Michèle Lesbre a tissé une relation particulière avec l’île de Sein. Ce bout de terre sauvage, quasi impossible à maîtriser, a causé des centaines de naufrages, répertoriés au fil des siècles. La liste est tellement longue qu’elle ressemble à une douloureuse litanie.
Aussi l’autrice a-t-elle choisi la sobriété en ponctuant ses chapitres des noms des embarcations englouties : Aventurier, Commandant Fernand, Aimable Perrine, Lion de Bruxelles… Une incantation poétique qui invite à se souvenir de toutes les victimes de cet endroit particulièrement délicat à naviguer.
En parcourant l’île, la romancière leur rend hommage : « Tout en me perdant dans le tissage des rues étroites, je tentais de me souvenir de certains noms des bateaux naufragés, comme si ces noms les sauvaient un peu du désastre, alors que les noms des hommes à bord restaient dans la nuit de l’oubli. »
Fascinée par cette géographie du malheur, Michèle Lesbre se laisse peu à peu envahir par l’écho de ses propres tempêtes, intimes ou politiques.
L’écrivaine convoque ses lectures inspirantes. D’abord Le Grand Marin de Catherine Poulain. Puis Le Carnet viking – 70 jours en mer de Barents de l’océanographe Anita Conti, dans lequel Michèle Lesbre note « Il n’est sage que d’aventures » et imagine l’océanographe « dans les embruns féroces qui menacent son corps fragile, tandis qu’elle est à l’affût d’une image à retenir, sa pêche à elle, sa façon d’habiter la mer. »
Ces deux femmes immergées dans l’univers masculin des bateaux de pêche fascinent l’autrice. Elles incarnent une force qu’elle leur envie, « d’une beauté dont la grâce devait bouleverser les hommes à bord ».
Car c’est bien de beauté qu’il s’agit dans ce récit contemplatif. Une beauté âpre, saisie par les rafales : « Sur Sein, j’ai vu à quel point la vie est en suspens, d’une beauté terrifiante et fragile, tremblante au-dessus du gouffre qui la menace et que certains oiseaux ont déjà fui. »
Si le naufrage des utopies a succédé aux belles espérances qui les ont portées, si le monde part à vau-l’eau, la puissance du paysage l’emporte. Elle conduit la promeneuse à un heureux vagabondage dans sa mémoire.
Michèle Lesbre maîtrise l’art du fragment et de l’ellipse. Ses phrases courtes claquent comme les voiles dans le vent. Son écriture épurée laisse place aux silences, aux non-dits. Chaque mot compte, chaque image porte. Si bien que l’émotion parcourt tout le livre : « Lorsque je feuillette mes propres cahiers de voyage, je retrouve ces instants où il faut accueillir les mots qui ont traversé le corps, la mémoire, où l’émotion fugace revient avec toute sa force. Toutes les villes, les langues, les lumières que je ne reverrai pas, m’accompagnent avec une force qui, elle, ne faiblit pas. » Un livre précieux, à garder près de soi.

Les livres et les films qui accompagnent Michèle Lesbre
LIVRES
Bailly Jean-Christophe, L’Instant et son ombre, Le Seuil, coll. « Fiction et Cie », 2008.
Bassani, Giorgio, Le Héron, Gallimard, coll. «Du monde entier », 1971 ; Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2005.
Berlowitz, Béatrice, Jankélévitch, Vladimir, Quelque part dans l’inachevé, Gallimard, 1978 ; Folio essais, 1987.
Bernard, Michel, Les Forets de Ravel, La Table Ronde, 2015 ; La Table Ronde, coll. « La Petite Vermillon », 2016.
Conti, Anita, Le Carnet Viking, 70 jours en mer de Barents (juin – septembre 1939), Payot, coll. « Voyageurs Payot », 2018 ; Payot, coll. « Peute Bibliothèque Payot », 2024.
Depussé, Marie, Oury. Jean, À quelle beure passe le train, Calmann-Lévy, coll. « Petite Bibliothèque des idées », 2003.
Duras, Marguerite, Le Marin de Gibraltar, Gallimard, 1952; Folio, 1977.
Echenoz, Jean, Ravel, Les Éditions de Minuit, 2006.
Herzog, Werner, Conquête de l’inutile (Eroberung des Nutzlosen), Caprici, 2009, et Sur le chemin des glaces, P.OL., 1988 ; Payot, coll. « Petite Bibliotheque Payot », 2016.
Leys, Simon, Les Naufragés du Batavia suivi de Prosper, Arléa, 2003 ; Points, 2020.
Magris, Claudio, Figures de proue : ces yeux de la mer, Gallimard, coll. « L’Arpenteur », 2024.
Michon, Pierre, Les Onze, Verdier, 2009 ; Folio, 2011.
Murakami, Haruki, La Ballade de l’impossible, Le Seuil, 1994 : Belfond, 2022.
Pavese, Cesare, Le Bel Été, Gallimard, coll. « Du monde entier », 1955 ; Gallimard, coll. « L’Imaginaire », 2014.
Poisson, Catherine, Le Grand Marin, Éditions de l’Olivier, 2016 ; Points, 2020.
Queffélec, Henri, Un recteur de l’île de Sein, Bartillat, 2007 ; Pocket, 2018.
Simenon, Georges, Le Chien jaune, Fayard, 1931; Le Livre de poche, 2005.

FILMS
Antonioni, Michelangelo, Wenders, Wim, Par-delà les nuages, 1995.
Brook, Peter, Moderato cantabile, 1960.
Flaherty, Robert, L’Homme d’Aran, 1934.
Grémillon, Jean, Remorques, 1941.
Hal Ashby, Harold et Maude, 1971.
Soldati, Mario, La Fille du fleuve, 1955.

Naufrage(s)
Michèle Lesbre
Sabine Wespieser Editeur
Roman
100 p., 15 €
EAN 9782848055862
Paru le 2/10/2025

Où ?
Le roman est situé sur l’île de Sein. On y évoque aussi Poitiers, Concarneau, Fécamp, Paris, Ferrari, Montfort-L’Amaury, Moscou et Irkoutsk, Naples et Procida.

Quand ?
L’action se déroule de nos jours.

Ce qu’en dit l’éditeur
L’émotion qui l’étreint dès son arrivée sur l’île de Sein, « petite terre têtue », plonge Michèle Lesbre dans une forme d’état de grâce. Dans la prose libre, voyageuse et rêveuse devenue sa manière, elle s’abandonne au vent incessant, le vent qui disperse « les miasmes de ce monde boiteux et tout ce qu’il entraîne dans sa fuite en avant. » Flanquée d’un petit chien noir et blanc court sur pattes rencontré au bar du village, elle reste « des heures à contempler cet immense ailleurs barré par l’horizon. »
Fascinée par la carte des naufrages dans le musée local, elle se laisse peu à peu envahir par l’écho de ses propres tempêtes, intimes ou politiques. Si le naufrage des utopies a succédé aux belles espérances qui les ont portées, si le monde part à vau-l’eau, la puissance du paysage l’emporte, conduisant la promeneuse à un heureux vagabondage dans sa mémoire.
L’autrice nous offre une balade d’une grande douceur, tant le sentiment d’apaisement que lui a donné son séjour sur l’île irradie son écriture. De retour à Paris, elle décidera de ne jamais revenir dans ce lieu qui, d’une certaine manière, a bouleversé sa vie, préférant le revisiter en rêve et ouvrir la possibilité d’autres voyages immobiles.

Les critiques
Babelio 

Les premières pages du livre
« Île de Sein, avril 2024

D’ABORD LE VENT.
Un vent tyrannique, incessant, portant une foule dense d’oiseaux venus déposer leurs œufs, c’est la saison. Certains viennent de loin, d’autres sont chez eux. Leurs vols tissent une trame flottante dans le ciel, leurs chants, qui parfois sont des cris, se mêlent à la rumeur océane. Je suis fascinée par les tourne-pierres, dont le corps fragile parvient à déplacer les lourds galets blancs pour picorer ce qui se cache dessous.
Je m’abandonne au vent, il est plus fort que moi. Des images de la côte irlandaise me viennent, cette beauté sobre, celle des îles d’Aran, l’air marin qui s’accroche à la peau, un goût de sel qui vient aux lèvres.
Je frissonne, tout mon corps s’abandonne, l’émotion me saisit, des larmes viennent, délicieuses, je pleure sans raison précise, je pleure pour tout, pour cette beauté, pour ce qu’est devenu un monde que j’ai aimé, pour les oiseaux qui naîtront mais ne survivront pas à la pollution, pour ce que je ne verrai pas. Je ne sais pas si je vais vraiment écrire ce texte, pourtant il me le demande. En tout cas, si je l’écrivais, il n’y aurait que la pluie et le vent, une petite pluie fine qu’ils appellent un « grain », et un vent têtu, comme les marins. Il n’y aurait pas d’histoires, il y en a tant, échouées dans les fonds obscurs, tant de naufragés, de bateaux éventrés par les rochers invisibles, de pêches clandestines, d’aventures fatales.
Mais il m’obsède, ce texte, il a pris racine en moi et dans toutes les mémoires des petits cimetières, à peine dessinés pour certains, sur cette lande sauvage où des lapins vivent des vies clandestines, cette île qui ressemble à une balafre sur la mer, une cicatrice sous laquelle flotte un monde disparu.
Et si je l’écrivais, ce serait peut-être l’histoire de belles espérances et ce qu’elles sont devenues. Ce qui disparaît sous mes pas ou qui n’a pas eu lieu. Sans doute est-elle aussi la nôtre, cette histoire, je veux dire de celles et ceux qui, comme moi, sont nés en 1939. Ma génération.
Cette année-là, le 8 janvier, un palangrier à voiles armé par treize hommes se perd corps et biens à l’ouest d’Ar Men. Ce naufrage flotte avec tant d’autres sous les reflets moirés qui dansent sur l’eau. Tous les autres, ceux d’avant et ceux qui suivront, hantent les fonds marins autour de cette île impassible et comme inscrite dans une sorte d’éternité.

Ils s’appelaient
Aventurier
Commandant Fernand
Aimable Perrine
Lion de Bruxelles
Prosper
Gironde

Je ne fais rien d’autre sur cette Île, c’est impossible.
Dès que je quitte le rivage, dès que je m’abrite des gifles du vent, je suis perdue, il me semble chercher quelque chose que je ne trouve pas. Ce qu’elle a soudain déposé en moi et qui m’envahit.
Comme souvent, ce sont des lectures qui me répondent, celles qui ont écrit dans ma mémoire des mots essentiels, des mots qui ne s’oublient pas. Ceux d’Anita Conti lorsqu’elle est sur le morutier Viking F797 en mer de Barents en 1939, quelques mois avant ma naissance, mais aussi ceux de Catherine Poulain dans son Grand Marin.
Leurs mots me reviennent et se mêlent en une étrange symphonie qui dérive et me serre le cœur.
Tout mon corps en frémit. Je n’ose me déshabiller et m’abandonner aux embruns, aux rafales soudaines, aux caresses que parfois l’océan semble me promettre et que la Lili du Grand Marin lit dans le regard de Jude, lorsqu’il hurle sur le pont du bateau comme en dialogue avec la mer, rugissante elle aussi.
Ces deux femmes immergées dans cet univers d’hommes que sont les bateaux de pêche lointaine me bouleversent et m’attirent, tant il y a entre elles et ces hommes une immense et merveilleuse complicité, une sorte de tendresse sans les mots, sans les gestes, sauf ceux que le bateau exige et qui les rend complices.
J’aurais dû venir ici avec ces livres pour les relire dans cette musique aléatoire et obsédante que jette la mer sur les rochers, dans l’air marin qui se colle à ma peau, dans cette lumière éblouissante, cet horizon voilé que je lis comme un souvenir lointain, celui d’un rêve trop court.
Parfois une présence importune encombre le paysage. Des bateaux transportent chaque jour quelques visiteurs venus de la baie d’Audierne, ainsi que les commandes de la seule épicerie de l’île. Je quitte alors ce bout de terre que ponctue le phare, et retourne dans les ruelles étroites où se serrent les petites maisons de pêcheurs et je me perds.
L’autre partie de l’île est inhabitée, c’est une lande, paraît-il, une lande sauvage où je ne m’aventurerai pas. Sans doute aurais-je le sentiment étrange de fouler une terre interdite, un monde lointain et resté en l’état, protégé des nuisances humaines. »

Extraits
« Tout en me perdant dans le tissage des rues étroites, je tentais de me souvenir de certains noms des bateaux naufragés, comme si ces noms les sauvaient un peu du désastre, alors que les noms des hommes à bord restaient dans la nuit de l’oubli, sauf bien sûr dans la mémoire des proches, de ceux et celles dont les chagrins avaient traversé le temps.
Et alors j’ai pensé à ces innombrables embarcations sommaires, transportant des milliers d’immigrés dont les corps perdus au fond de la Méditerranée, de la Manche, et ailleurs, dessinaient un monde cauchemardesque et clandestin, et que tous ces naufrages étaient le nôtre aussi, même si nous faisions semblant de l’ignorer. » p. 39

« Il n’est sage que d’aventures, écrit Anita dans ses carnets. Et je l’imagine dans les embruns féroces qui menacent son corps fragile, tandis qu’elle est à l’affût d’une image à retenir, sa pêche à elle, sa façon d’habiter la mer, dont il est si difficile d’apaiser l’humeur et à laquelle il est quasi impossible de résister.
C’est cette force qui me fascine, que je lui envie, qui me la rend si belle, d’une beauté dont la grâce devait bouleverser les hommes à bord. On devine leur émotion à travers quelques anecdotes de son journal. Je revois cette photographie superbe où elle surplombe l’équipage au travail avec son appareil en main, son visage lumineux dans le brouillard marin, et les corps affairés des hommes plongés dans les entrailles des morues, avec lesquelles ils se battent. » p. 57

« Sur Sein, j’ai vu à quel point la vie est en suspens, d’une beauté terrifiante et fragile, tremblante au-dessus du gouffre qui la menace et que certains oiseaux ont déjà fui. » p. 71

« Lorsque je feuillette mes propres cahiers de voyage, je retrouve ces instants où il faut accueillir les mots qui ont traversé le corps, la mémoire, où l’émotion fugace revient avec toute sa force. Toutes les villes, les langues, les lumières que je ne reverrai pas, m’accompagnent avec une force qui, elle, ne faiblit pas. » p. 76

« J’ai dû tout inventer, tout découvrir, pour me construire. Celle que je suis et qui se découvre encore, tardivement, m’étonne parfois, me déconcerte aussi. Je renonce un peu à la connaître vraiment, elle ne cesse de se transformer avec le temps et je me méfie de ses brusques tempêtes. Le bateau sur lequel je me suis embarquée, juste la vie, navigue un peu trop au hasard. C’est fugitif, mais c’est beau, et les rencontres, mêmes brèves, ont quelque chose de rassurant. Quelque part et sans cesse, des vies se croisent et se quittent. Je ne voudrais pas faire marche arrière, je ne voudrais pas oublier le long chemin jusqu’à ce jour, je voudrais seulement qu’il m’aide à être sereine. Le vent de Sein m’a jetée dans mes affres intimes. Il m’a reconnue. C’est pour cette raison même que l’île me bouleverse. » p. 90

À propos de l’autrice

Michèle Lesbre © Photo DR

Michèle Lesbre est née en 1939. Après avoir étudié à Clermont-Ferrand, elle a commencé à enseigner en Auvergne, tout en militant à l’extrême gauche et en jouant dans des troupes de théâtre amateur. D’abord institutrice, puis directrice d’école maternelle, elle vit à Paris. Auteure d’une vingtaine de livres, elle publie depuis 1991. Elle a rejoint dès sa création le catalogue de Sabine Wespieser éditeur, avec Boléro (2003), puis, notamment, Un certain Felloni (2004), Le Canapé rouge (finaliste du prix Goncourt 2007), Un lac immense et blanc (2011), Écoute la pluie (2013),  Rendez-vous à Parme (2019) et Tableau noir (2020), La Furieuse (2023) ou Naufrage(s) (2025). (Source : Sabine Wespieser Editeur)

Page Wikipédia de l’autrice 



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