Nadège Erika – Ce refrain qui te plaît ***

Par Laure F. @LFolavril

Harper Collins – août 2025 – 280 pages

*

« J’ai l’impression qu’on fait un crash-test sur nous, les miens, moi, les gens de mon espèce. De la mort de mon enfant à la prise en charge désastreuse de la maladie de son frère, en passant par le classement sans suite de notre plainte pour violences, on dirait qu’on cherche jusqu’où je peux tenir. Je m’imagine inconsciente, plaquée au sol, pendant que ce monde patriarcal, classiste et raciste à souhait me secoue légèrement par les épaules afin de vérifier si je vis encore. »

Kora a la quarantaine, elle est éducatrice spécialisée à Paris. Mère célibataire, elle a toujours élevé seule son fils Sol, dont le frère jumeau est mort à quelques mois de vie. Aujourd’hui, Sol est un tout jeune adulte de vingt-trois ans, dont le comportement inquiète Kora de plus en plus. Il disparaît des jours entiers sans donner de nouvelles, traîne la nuit dans des coins mal famés, se drogue. Un matin, elle le retrouve allongé sur le palier devant chez elle, trébuche sur son corps. Elle assiste alors, impuissante, à une de ses crises. Aura lieu la première hospitalisation. Kora finira par ne plus les compter. « Aujourd’hui, je me rappelle que sur le moment la pensée m’avait traversée qu’avec un fils mort, et son jumeau en psychiatrie, il n’était plus à prouver que Dieu m’avait unfollow. »

Le second roman de Nadège Erika, dès les premières lignes, dès les premiers mots, me prend à la gorge. Et serre. Serre. Il me prend aux tripes. Et n’en finit plus de les nouer. L’autrice se met à nu dans toute son impuissance et sa solitude de mère. Elle met également à nu les défaillances du système de santé et de la société quand on tente de survivre avec un enfants qui souffre de troubles psychiques, les affres de l’errance diagnostique, les angoisses qui n’en finissent pas. Je retrouve la plume de Mon Petit qui m’avait tant bouleversée, une plume nerveuse et poétique, qui fout à terre.

« C’est peut-être les mères qui ont des problèmes, pourtant c’est les mères que l’on appelle. Partout, c’est les mères que l’on voit. C’est les mères que l’on juge. C’est les mères que l’on tue. »